Gare aux vols d’équipement sur vos chantiers!

9 juin 2023
Par Mathieu Ste-Marie

Les vols sur les chantiers de construction ont toujours donné des maux de tête aux entrepreneurs. Or, le problème s’est empiré avec la pénurie de matériaux de construction et la hausse marquée de leur prix. Face à ce fléau, des solutions existent.

En une seule année, l’entreprise Amec Construction s’est fait voler quatre fois sur ses chantiers. À chacune d’entre elles, des outils ont été dérobés. « Les gens ont voulu se faire un coup d’argent rapidement parce que les outils se vendent bien », observe Marie-Pier Desbiens, ingénieure et associée chez Amec Construction, une entreprise du Saguenay–Lac-Saint-Jean. De son côté, Construction Unibec a été victime de trois vols en quelques mois, sur un chantier près des terrains de l’Hôpital de Chicoutimi. En avril dernier, une entreprise de Trois- Rivières a été victime d’un vol dans ses camions.

 

Si des délits ont été médiatisés, la grande majorité ne fait pas les manchettes. « Depuis la pandémie, les matériaux sont plus difficiles à avoir, la livraison est plus longue, donc les équipements et les matériaux ont une plus grande valeur aux yeux des voleurs », explique le directeur général de Trimax Sécurité, Frederico Ramos. Son entreprise spécialisée dans les services de sécurité est engagée pour surveiller des chantiers de Montréal, de la Montérégie et de l’Estrie principalement le soir et la nuit. Sans surprise, les voleurs sont attirés vers les matériaux comme le bois et l’acier qui ont connu une hausse de prix. Toutefois, le directeur général constate que les outils des travailleurs et les « équipements roulants » sont plus particulièrement prisés par les malfaiteurs. « Tout ce qui est camion, engin mécanique, véhicules poids lourds est populaire auprès des voleurs. Il y a aussi les catalyseurs qui sont beaucoup volés. »

 

Marie-Pier Desbiens ingénieure et associée chez Amec Construction. Crédit:  Amec Construction

 

Le manque de lumière et la facilité d’accès sur les chantiers rendent la tâche facile aux malfaiteurs. « Les chantiers de construction sont souvent plus vulnérables par rapport à une usine ou un entrepôt où l’accès est moins évident », observe Frederico Ramos.

 

Un milliard de pertes

Il n’existe à peu près pas de données au Québec et au Canada sur le nombre de vols de matériaux et d’équipements de construction sur les chantiers. En revanche, une étude française publiée l’an dernier donne une idée sur l’ampleur du phénomène. Selon celle-ci, le nombre de vols d’engins de chantier a doublé entre 2020 et 2021. Cette même étude rapportait qu’en 2021, une entreprise sur trois possédant des matériaux ou des engins de chantier a déclaré avoir été touchée par un vol.

 

Aux États-Unis, environ 1000 pièces d’équipement de construction sont rapportées volées chaque mois au National Crime Information Center, la base de données centrale au pays. Ce chiffre représente une faible proportion des vols puisque la plupart des méfaits ne sont pas rapportés. Au Canada, on estime que les vols d’équipement de construction ont atteint jusqu’à un milliard de dollars en 2021.

 

Des solutions pour prévenir les vols

Mis à part le cout de remplacement de l’équipement, les vols sur les chantiers peuvent entrainer d’importantes répercussions, notamment les pertes de temps qui peuvent retarder la fin des travaux et occasionner des pénalités pour non-respect des délais de construction. « C’est aussi une perte de temps au plan administratif, puisqu’il faut tenter d’identifier les outils que l’on s’est fait voler. Cela demande beaucoup d’énergie inutilement », explique Marie-Pier Desbiens.

 

Depuis les méfaits de l’an dernier, son entreprise a redoublé de vigilance pour éviter les vols. Alors qu’il y a quelques mois les outils étaient déposés dans des coffres barrés, aujourd’hui ils sont laissés dans un conteneur devant lequel une machinerie lourde est stationnée. Ce mastodonte bloque la porte du conteneur et ainsi l’accès aux voleurs. « Les seules façons de voler les outils seraient de trafiquer le moteur du véhicule pour le faire avancer ou de faire un trou dans le conteneur avec une torche », explique madame Desbiens, ajoutant que son entreprise ne s’est pas fait voler depuis les six derniers mois.

 

Peu d’investissement en sécurité

Pour sa part, Frederico Ramos conseille à ses clients de toujours éclairer leur chantier de construction et d’installer des grillages autour du site afin de rendre l’accès au chantier plus difficile. Le gestionnaire ajoute que l’embauche d’agents de sécurité et/ou l’installation de caméras de sécurité reliées à des centrales de télésurveillance ne sont pas à négliger. De plus, simplement l’installation d’un panneau avec la mention « Surveillance par caméra » peut dissuader les voleurs de s’aventurer plus loin sur le chantier.

 

Il constate néanmoins que la plupart des entrepreneurs investissent peu en sécurité, même si les vols peuvent parfois faire perdre plusieurs milliers de dollars et du temps précieux. « Par exemple, des entrepreneurs vont engager un agent plutôt que deux alors que la superficie à surveiller est très vaste. Souvent, ils vont y aller avec le strict minimum », souligne-t-il.

 

Gageons que la hausse des vols ces derniers mois a convaincu les entrepreneurs d’investir en sécurité ou, du moins, de prendre les moyens pour prévenir ces crimes.

 

DES GESTES À FAIBLE COUT

Si l’installation d’une clôture ou l’embauche d’un gardien peut couter cher à une entreprise, des mesures peuvent toutefois être adoptées sans devoir piger dans ses poches. En voici quelques-unes :

  • Cadenasser et verrouiller les coffres, les roulottes, les équipements motorisés et les cages. Les travailleurs peuvent également retirer et garder sous surveillance ou à l’abri les clés des véhicules.
  • Identifier les véhicules et les équipements lourds et faire l’inventaire de tous les équipements avant de commencer un chantier.
  • Prévoir des zones spécifiques loin de la rue et des accès au chantier pour entreposer les outils et la machinerie.
  • Penser à enlever les clés des engins et même enlever les batteries de ceux-ci.
  • Éviter d’approvisionner un chantier en machinerie et en matériaux trop longtemps à l’avance, puisque plus il y a de marchandises, plus il y a de risque de se faire voler.