Prévisions de la CCQ : vers un nouveau record en 2025

1 avril 2025
Par Cynthia Bolduc-Guay

Après un regain de vitalité en 2024, l’industrie de la construction est en bonne position pour dépasser le sommet atteint en 2022.

Malgré l’incertitude économique qui demeure dans certains secteurs, la Commission de la construction du Québec (CCQ) se montre très optimiste. « Notre esprit, c’est que ce sera une bonne année, une année record et que l’activité demeurera solide », estime Mélanie Ferland, cheffe de section recherche, direction analyse stratégique et diversité à la CCQ.

 

Selon ses prévisions, l’industrie de la construction devrait cumuler 211,5 millions d’heures travaillées cette année, soit une hausse de 1 % par rapport à 2024. Cette dernière s’est même révélée plus vigoureuse que prévu, affichant 210 millions d’heures, soit une hausse de 1 % comparativement à 2023, rattrapant ainsi le niveau record de 2022.

 

Secteur industriel : la hausse se poursuit

De tous les secteurs de l’industrie, la construction industrielle est celle qui s’annonce pour tirer son épingle du jeu. La CCQ y prévoit une hausse de 14 % pour atteindre 16,5 millions d’heures, et ce, malgré les incertitudes reliées à la filière batteries qui avait stimulé les investissements dans ce secteur l’année précédente. Le projet de Northvolt, par exemple, devrait se poursuivre selon l’entreprise, même si des inquiétudes demeurent. D’autres projets, comme l’usine de matériaux de cathode par Ford-EcoPro CAM, sont aussi mis sur la glace le temps de trouver de nouveaux investisseurs.

 

Mélanie Ferland, cheffe de section recherche, direction analyse stratégique et diversité, CCQ. Crédit : CCQ

 

Dans l’ensemble, la CCQ note que d’autres projets déjà entamés garderont ce secteur très actif en 2025, dont l’agrandissement d’une distillerie d’éthanol chez Greenfield Global, le projet Odyssey d’Agnico Eagle à Malartic et la mine de graphite Matawinie à ciel ouvert de Nouveau Monde Graphite. « Il faut savoir que les projets en cours deviennent plus importants quand ils s’approchent de la fin », explique Mélanie Ferland.

 

Une remontée du secteur résidentiel

Après un creux en 2024, le secteur résidentiel reprendra graduellement de la vigueur. La baisse des taux d’intérêt — qui est appelée à se poursuivre en 2025 — et les besoins toujours criants en logements vont apporter un nouveau souffle à ce secteur actuellement sous haute pression. La CCQ croit que les différents programmes mis en place pour accélérer la construction et faciliter l’accès à la propriété vont élever le secteur résidentiel à 38 millions d’heures, soit une augmentation de 7 % par rapport à l’année précédente.

 

« Les choses semblent se replacer plus vite que l’on avait cru, même que les mises en chantier pour 2024 s’avèrent mieux que ce que l’on avait anticipé. On s’attendait à 45 000 mises en chantier en 2024, alors que ça sera plutôt autour de 47 500. Pour 2025, on peut déjà dire que c’est très possible qu’on dépasse les 50 000 unités », rectifie Mélanie Ferland.

 

Ralentissement dans l’institutionnel, le commercial, le génie civil et la voirie La CCQ note un recul des investissements publics attendus dans le Plan québécois des infrastructures pour 2025 et 2026, si bien qu’elle s’attend à une diminution de 2,1 % des heures travaillées dans le secteur commercial et institutionnel, portant celles-ci à 116,5 millions, et à une baisse de 1% dans le secteur du génie civil et de la voirie, où 40,5 millions d’heures travaillées devraient être enregistrées.

 

« Oui, ces deux secteurs tourneront au ralenti, mais en même temps, les baisses ne sont pas très importantes en raison des nombreux chantiers déjà en cours et qui se poursuivent », relativise Mélanie Ferland. La perte de vitesse sera d’autant plus ressentie dans le Grand Montréal, la Capitale- Nationale, l’Outaouais, l’Estrie et la Mauricie, mais certaines régions connaîtront une hausse des activités, notamment au Saguenay–Lac-Saint-Jean, au Bas-Saint-Laurent– Gaspésie, en Abitibi-Témiscamingue et dans le Nord-du- Québec.

 

Dans le secteur commercial plus précisément, plusieurs chantiers d’envergure continueront de générer des heures, dont le quartier Fleur de Lys à Québec, les développements mixtes de type transit-oriented development (TOD) à Brossard et à Longueuil, la construction d’un complexe de traitement de données à haute intensité par QScale à Lévis, ainsi que la reconstruction de la toiture du Stade olympique à Montréal. Ce volume d’heures devrait augmenter progressivement au cours de l’année, encouragé par la baisse des taux d’intérêt qui devrait graduellement stimuler à nouveau l’intérêt des promoteurs pour des projets résidentiels de plus de six étages. Cette croissance risque toutefois de se faire davantage ressentir en 2026.

 

Du côté du génie civil et de la voirie, même si l’année 2025 connaîtra un léger recul après le niveau inégalé de 2024, ce sera sans doute de courte durée, car de nombreux projets devraient voir le jour en lien avec le Plan d’action 2035 d’Hydro-Québec ainsi que dans le secteur privé.

 

Stabilité des embauches

Alors que l’industrie s’apprête à vivre une année record, les intentions d’embauche, elles, restent stables. « On pourrait s’attendre à ce que les embauches augmentent un peu, mais les employeurs qu’on a sondés à l’automne dernier s’attendent à une stabilité au niveau des heures, donc ça se reflète dans les intentions d’embauche », précise Mélanie Ferland.

 

En raison de cette stabilité anticipée, 34 % des donneurs d’ouvrage prévoyaient ainsi embaucher le même nombre d’employés que l’année précédente. Ils ont aussi été moins nombreux à connaître de la difficulté à recruter, passant de 59 % à 53 % entre l’automne 2023 et 2024.

 

Une ombre au tableau

À ce tableau assez positif, une grande incertitude demeure : la menace de tarifs de 25 % sur les exportations aux États-Unis. L’industrie devra donc rester alerte et agile pour faire face aux possibles impacts que pourrait avoir cette nouvelle politique américaine si elle venait qu’à entrer en vigueur. « Évidemment, si cette imposition de tarifs venait qu’à se concrétiser, il y aurait certainement des risques de récession », précise Mélanie Ferland, qui ajoute qu’il est encore trop tôt pour prédire ce qu’il adviendra de cette menace.