ENVISION est aux infrastructures ce que LEED est aux bâtiments. Cette nouvelle certification, qui pourrait être apposée sur le pôle multimodal Vendôme ainsi que sur le garage Côte-Vertu, et qu’a obtenue le corridor du nouveau pont Champlain, permet d’en officialiser le caractère durable.
Fruit d’un travail de recherche et de développement effectué conjointement par l’équipe du programme Zofnass de l’Université Harvard et l’organisme américain Institute for Sustainable Infrastructure (ISI), la troisième version de la norme ENVISION de l’ISI a été publiée le 17 avril dernier.
Plusieurs projets de la Société de transport de Montréal (STM) planchent présentement sur cette dernière, le garage Côte-Vertu et le pôle multimodal Vendôme en tête de liste. André Porlier et Alexis Lautard, respectivement gestionnaire corporatif et conseiller corporatif en développement durable pour la division Planification stratégique et innovations de la STM, parlent d’une certification dont les objectifs touchent directement la communauté, son bien-être et son développement durable.
« La norme met l’accent sur l’amélioration de la qualité de vie par le biais de diverses interventions, notamment la santé et la sécurité des lieux, la minimisation de la pollution par le bruit, la réduction de la pollution lumineuse, l’encouragement des modes de transport alternatifs, l’amélioration des espaces publics et la préservation des vues et du caractère local », affirme monsieur Lautard.
Des influences de LEED et WELL
L’influence de LEED, tout comme celle de WELL, est perceptible à l’examen des critères de la nouvelle norme. Ce qui en ressort, ce sont des améliorations par rapport aux apprentissages qui découlent de l’utilisation LEED, qui célèbre d’ailleurs son 20e anniversaire cette année. Alexis Lautard qualifie ENVISION de flexible. « Il est possible de moduler les points accordés sur chaque crédit, précise-t-il. Le pointage est donc proportionnel à l’effort consenti, ce qui encourage toutes les initiatives s’inscrivant dans l’esprit de la certification, si minimes soient-elles. »
Tout type d’infrastructure peut être certifié par le biais de cette même norme, les crédits non applicables étant exclus de l’équation globale. La STM a choisi de miser sur la certification ENVISION à la suite d’un essai peu fructueux de la norme LEED sur certains de ses projets d’infrastructure. Davantage des milieux transitoires que des milieux de vie, ces constructions lui étaient incompatibles.
ENVISION est composée de 55 crédits répartis en cinq catégories. Chaque crédit est présenté à l’aide d’une intention, d’un indicateur de performance ainsi que d’une série de questions d’évaluation servant à déterminer si le projet s’accorde avec l’intention derrière le crédit. Les paramètres prescrits pour leur obtention sont toujours reliés à des normes de l’industrie et généralement définis comme des pourcentages d’améliorations. Ainsi, la norme évolue avec les standards de l’industrie.
« L’adoption du système de certification ENVISION amène la vision de développement durable de la STM au coeur de nos projets, explique André Porlier. La démarche de certification force l’intégration du développement durable au sein des processus de réalisation, de la conception jusqu’au chantier. Il est vrai qu’il faut documenter davantage, mais cela requiert une interdisciplinarité qui ne serait peut-être pas aussi effective si le projet n’était pas certifié. »
Le succès de cette certification pour un projet est souvent tributaire de la désignation d’une personne responsable de celle-ci, afin de mobiliser les équipes de concepteurs ou de chantier au moment opportun. Pour le gestionnaire corporatif de la STM, il n’y a aucun doute quant à la valeur d’une telle démarche : « Le rapport coût/ bénéfices est clairement avantageux pour une organisation comme la nôtre. »
Durable dans le temps
Pour un projet de l’ampleur du garage Côte-Vertu, ENVISION exige que la durée de vie des équipements soit considérée. Alexis Lautard précise : « Il faut penser à long terme. Les ressources allouées à la maintenance et à l’entretien sont également considérées. Il en est de même pour la déconstruction en fin de vie. Bref, l’analyse du cycle de vie est rigoureuse, ce qui se traduit par des bénéfices pour l’entité responsable de l’exploitation des infrastructures.
Nous allons ainsi plus loin que dans des projets non certifiés, notamment sur les matériaux ou encore la résilience aux changements climatiques, poursuit-il. L’objectif, à terme, est de se baser sur les bonnes pratiques des projets certifiés pour améliorer l’ensemble des projets de la STM. » Certains aspects innovants du projet Vendôme seront également reconnus par la certification. Dans la composition du béton des trottoirs et de la boucle d’autobus temporaire, une partie du ciment (10 %) est remplacée par de la poudre de verre recyclé, ce qui réduit l’empreinte écologique de l’infrastructure.
L’équipe de la STM doit évidemment faire face à certains défis concernant l’expertise disponible. En effet, les concepteurs et constructeurs connaissent très bien les projets de bâtiments ou la certification LEED. Par contre, un projet d’infrastructure aspirant à une certification ENVISION constitue en soi une bonne part de nouveauté.
L’autre défi, c’est de répondre à la question du coût engendré par celle-ci. André Porlier répond : « Tout dépend de la nature des innovations et du niveau de certification visé. Les niveaux bronze et argent ne requièrent généralement que des changements peu coûteux dans l’approche de gestion, la conception ou le choix des matériaux.
Lorsqu’on convoite les niveaux or et platine, des investissements supplémentaires, proportionnels au niveau de certification, sont requis. Cela dit, nous constatons que pour certains investissements, pour atteindre des niveaux de certification supérieurs, notre rendement de l’investissement est de quatre ans, ce qui s’avère fort attrayant. »
Malgré son caractère nouveau, la certification ENVISION permet de mettre en valeur plusieurs bonnes pratiques déjà en place à la STM. André Porlier cite notamment en exemple l’aspect de la communication auprès des populations locales. « Nous avons déjà l’habitude de consulter la communauté, mais dans le cadre de la certification, nous définissons les stratégies et les niveaux de communication requis pour assurer l’acceptabilité sociale du projet, en plus de démontrer les résultats du dialogue entre les diverses parties prenantes. »
La STM applique une politique organisationnelle de développement durable depuis 2010 et s’est engagée à suivre les grands principes du développement durable depuis 2005. En 2017, le Plan de développement durable 2025 et le Plan stratégique organisationnel 2025 (PSO 2025) ont été dévoilés. On retrouve dans le PSO 2025 l’engagement suivant : « Tous les investissements prévus au PSO 2025 intégreront également une composante de développement durable (LEED, ENVISION, etc.). »
Catégories et sous-catégories parmi lesquelles les 55 crédits modulables sont distribués.
Qualité de vie
- But
- Communauté
- Bien-être
Leadership
- Collaboration
- Gestion
- Planification
Consommation de ressources
- Matériaux
- Énergie
- Eau
Milieux naturels
- Écologie
- Eau
- Biodiversité
Climat et risques
- Émissions
- Résilience
Cet article est tiré du Supplément thématique – Infrastructures et grands travaux 2018. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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