Implanté au coeur de l’écoquartier d’Estimauville, le nouveau siège social de la Commission des normes de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) se démarque tout autant par sa signature architecturale distinctive que par ses solutions spécifiques innovantes.
Pour mener à bien le chantier dont les travaux se sont tenus de mars 2018 jusqu’à la livraison du bâtiment en mars 2021, une somme équivalant au cout estimé à 143,2 millions de dollars (M$) a été investie, ce qui se trouve en-deçà du budget autorisé de 151 M$. Pilotée par la Société québécoise des infrastructures (SQI), la réalisation de cet édifice administratif, vaste de 34 500 mètres carrés répartis sur huit étages, a été conçue pour accueillir ses quelque 1 850 employés.
De forme plutôt carrée avec quelques décrochés, le bâtiment surprend, vu de l’intérieur, avec le plan de ses étages en forme de U qui s’articulent autour d’un atrium central. Avec sa structure de bois, l’atrium s’ouvre sur l’une des façades du côté d’un lien vert qui s’arrime avec le parc situé au centre de l’écoquartier, permettant à la lumière naturelle de pénétrer en abondance tout au coeur du bâtiment. L’immeuble loge des aires de bureaux qui occupent la majorité des étages, alors que la partie inférieure donne accès, notamment, à une cafétéria, à un centre de la petite enfance et à un centre d’activité physique.
Audace architecturale
Mais le caractère spécifique de ce projet sans nul autre pareil est assurément le stationnement réparti sur sept étages qui est contigu au bâtiment. « Ce stationnement est étagé, car les conditions de nappe phréatique ne permettaient pas des excavations importantes sur le site », précise l’architecte Jacques Tremblay, directeur de l’expertise technique pour les projets en partenariat pour l’Est du Québec à la SQI. « Nous avons ainsi tiré profit de cette problématique pour créer un élément signature tout à fait distinctif. »
L’enveloppe du stationnement étagé a demandé de nombreuses prouesses techniques mettant en avant-plan les qualités constructives et décoratives de l’aluminium architectural. « Nous avons saisi l’opportunité pour créer un élément signature au projet en concevant une paroi architecturale en aluminium qui a pu être développée grâce à l’aide financière octroyée à la SQI par le ministère de l’Économie et de l’Innovation (MEI), dans le cadre de la Stratégie québécoise de développement de l’aluminium (SQDA), ajoute-t-il. L’objectif consistait à intégrer l’aluminium de manière innovante pour la SQDA afin de répondre à des problématiques particulières et aussi pour mettre en valeur ses aspects de durabilité et de recyclabilité, sa résistance à la corrosion et ses qualités esthétiques. De fait, tous ces critères nous ont guidés dans le développement de la solution architecturale. »
« L’essentiel des revêtements du bâtiment et du stationnement étagé est composé d’aluminium émaillé, fait remarquer le directeur de projet, Normand Hudon, président de Coarchitecture, et comme ce matériau est durable, qu’il nécessite peu d’entretien et que son cout est abordable, nous avons choisi d’en faire l’utilisation. »
Unique en son genre, le système de façade d’aluminium du stationnement a constitué une incitation à faire émerger des solutions techniques des plus innovantes. « Ce système sophistiqué de mâts et de drapeaux qui pivotent sur un axe vertical permet la ventilation naturelle des étages tout en bloquant la neige, et c’est la répétitivité de ses composantes qui a favorisé l’utilisation de techniques de fabrication industrielle plutôt inusitées dans la construction du bâtiment, explique Normand Hudon. Dans ce cas-ci, nous avons choisi les procédés d’estampage et de moulage. Ces techniques spécifiques utilisées pour profiler les drapeaux du stationnement ont permis de leur donner une résistance au vent. Pour y parvenir, nous avons adopté une approche par “essai-erreur”, mais il y a énormément d’efforts de recherche et de développement qui ont été apportés, autant pour le moulage que pour l’extrusion et la préfabrication. Sans parler des diverses simulations de conditions atmosphériques et des simulations visuelles tridimensionnelles qui ont été exécutées ainsi que des autres prototypes grandeur nature qui ont été développés, notamment. »
Outre l’aluminium, il convient de souligner la place de choix accordée au bois dans ce projet d’exception : « Le bâtiment fait la part belle à l’utilisation du matériau bois et sa signature la plus éloquente réside sans conteste dans son imposante structure en V où s’appuie la partie vitrée de l’atrium », tient à rappeler Jacques Tremblay. Cependant, mener à bien une construction d’une telle envergure fut loin d’être une mince tâche. Nombre de procédés innovants ont de nouveau été déployés, faisant appel au savoir-faire pointu des concepteurs, qui sont parvenus à relever le défi haut la main.
« La CNESST avait une forte volonté de mettre en valeur le bois dans son nouveau siège social, mais l’intégration d’une structure de bois d’oeuvre dans une construction incombustible, tel que le Code du bâtiment l’exigeait, n’allait pas de soi, soutient Normand Hudon. Il aura fallu l’appui financier du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec, de concert avec l’expertise de Technorm, pour mettre en oeuvre une solution de rechange à l’aide de systèmes de désenfumage assez élaborés qui a pu être considérée comme mesure équivalente aux yeux du Code. Disons qu’il est plutôt rare de voir une telle détermination, une telle audace, puisque dans ce cas-ci, la voie n’était pas du tout tracée. »
Aucune de ces prouesses n’aurait pu être possible sans l’intervention de spécialistes hautement qualifiés, qui d’emblée ont apporté leur soutien aux architectes et aux ingénieurs dans le développement de la solution proposée pour l’aluminium et pour le bois. En plus des intégrateurs qui ont mis à profit leur savoir-faire et leur expertise pour la construction de bois, des firmes de spécialistes ont collaboré aux calculs, aux modèles, aux maquettes et aux essais.
Ce projet, conçu selon les meilleures pratiques de contrôle énergétique, s’est aussi engagé à respecter le Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques et de fait, démontre une belle performance sur le plan énergétique tout en tenant compte de la réduction des ilots de chaleur et de l’aménagement écologique des sites. Il brigue d’ailleurs la certification LEED v4 et la certification WELL.
Tout comme Normand Hudon, Jacques Tremblay croit qu’il y a place pour l’innovation dans chaque projet puisqu’elle représente une belle opportunité pour améliorer la qualité du cadre bâti. « La bonne nouvelle est que nous nous retrouvons dans un contexte vraiment propice à son déploiement avec les pratiques associées au BIM et celles issues de la conception intégrée. Chaque innovation est une source d’inspiration pour les prochains ouvrages. »
Le siège social de la CNESST fait la part belle à l’innovation grâce à la mise en valeur de l’aluminium ainsi qu’à l’intégration du bois qui en soi constituait tout un défi. Il concentre une multitude d’éléments novateurs, à commencer par son stationnement qui est un des éléments signature de ce projet mettant en vedette son revêtement d’aluminium favorisé par le MEI, dans le cadre de la SQDA.
Cet article est tiré du Supplément thématique – Bâtiment 2021. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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