Plusieurs particularités ont marqué la conception et la construction de l’hôpital Vaudreuil-Soulanges, dont la présence d’un sol aux caractéristiques géotechniques particulières et une quantité impressionnante d’informations. Pour surmonter ces défis, les équipes en place ont fait preuve de créativité et d’une grande communication.
Cette année s’amorçait la construction de l’hôpital de Vaudreuil-Soulanges, un établissement de 404 lits situé à l’angle du boulevard de la Cité-des-Jeunes et de l’autoroute 30, à Vaudreuil-Dorion. Deux pavillons le composent : le pavillon A, de trois étages, regroupera les consultations externes, les laboratoires, un auditorium de 300 places et l’entrée principale de l’hôpital, tandis que le pavillon B (13 étages) logera l’urgence, 11 blocs opératoires, l’imagerie médicale et le centre mère-enfant. Le budget du projet s’établit à 2,6 milliards de dollars.
Le chantier s’est mis en branle au début de 2023. À la mi-août, environ la moitié des pieux avaient été posés, le parachèvement de ceux du pavillon A étant prévu au cours des semaines suivantes. Suivront les travaux de coffrage, d’armature et de bétonnage de la première dalle du rez-dechaussée. Par ailleurs, trois grues seront installées, s’ajoutant aux quatre déjà en place. Enfin, le 21 août marquait le début des travaux d’infrastructures, notamment au chapitre des conduites d’égouts et d’aqueduc.
Des pieux caissons pour les fondations
Ce projet se démarque par l’utilisation des pieux caissons pour les fondations. Cette technique consiste à insérer dans le sol un caisson temporaire, soit un cylindre de 1,2 à 1,5 mètre de diamètre. La terre qu’il contient est retirée à l’aide d’une tarière — un instrument à mèche vrillée destiné à effectuer des forages dans le sol — au fur et à mesure que le cylindre s’enfonce, jusqu’à atteindre le roc. Une fois le caisson vidé et nettoyé, l’armature est installée et du béton est injecté. Le caisson temporaire est ensuite retiré.
Pomerleau, qui a été mandaté pour ce projet, a proposé cette méthode en réponse aux caractéristiques géotechniques du sol sur lequel reposera le futur hôpital. Outre la profondeur et la largeur des pieux, la machinerie spécialisée utilisée — et ses risques de bris — a représenté un défi, affirme l’ingénieur Pierre-Olivier St-Jean, conseiller en bâtiment au CISSS de la Montérégie-Ouest. À cela se sont ajoutés les aléas de la météo : « Nous allons assez creux dans le sol, près de la nappe phréatique. Il y a un enjeu de gestion de l’eau qui, en plus cette année, a été un peu exacerbé par les quantités de pluie que nous avons eues », explique-t-il.
La technique des pieux caissons a aussi été préconisée pour la construction du REM, mentionne Martin Ouellet, directeur des projets majeurs d’infrastructures au CISSS de la Montérégie-Ouest. Quelque 360 d’entre eux ont été utilisés, répartis le long du parcours allant de l’ouest de Montréal jusqu’à Brossard. À titre de comparaison, l’hôpital de Vaudreuil-Soulanges en concentre plus de 500 dans un même lieu. « Actuellement, sur un seul site, d’avoir 540 pieux environ, c’est le plus gros projet de pieux caissons en Amérique du Nord », illustre-t-il.
Des bases de données qui se parlent
L’approche collaborative constitue une autre des particularités du projet, lequel a été conçu avec l’approche BIM-PCI. En parallèle, le CISSS de la Montérégie-Ouest devait recenser tous les équipements nécessaires au bon fonctionnement d’un hôpital : appareils pour examens d’IRM, chaises de bureau, distributeurs de gel, etc. Il y aurait entre 1 700 et 1 800 types d’éléments différents. Cette information est indispensable aux architectes et ingénieurs, qui doivent concevoir chaque pièce du bâtiment en fonction des équipements qu’elle contiendra. Pour améliorer le partage d’information, il a été décidé qu’il y aurait échange de données entre la plateforme de conception et celle du CISSS.
Lorsque Pierre-Olivier St-Jean se remémore ses premières années sur le marché du travail il y a une douzaine d’années, il a en tête les listes Excel que les gens utilisaient à l’époque. Comme plusieurs personnes ne pouvaient travailler dans un fichier en même temps, elles créaient des copies de travail, ce qui engendrait inévitablement des pertes d’information. En utilisant plutôt une base de données qu’ils partagent avec les concepteurs, les responsables de l’équipement ont la certitude que l’information est toujours à jour et complète. « Ça augmente la précision de l’information que nous donnons à nos professionnels. Ça, c’est le principal avantage. Nous diminuons beaucoup les risques d’erreurs en conception, car nous nous assurons que le besoin réel est bien défini dans les plans », fait valoir l’ingénieur.
La dimension 7D du BIM, celle consacrée à la maintenance, intéressait aussi beaucoup l’équipe du CISSS. « Une fois que la construction est finie et qu’on a pris possession du bâtiment, il y a une quantité d’informations phénoménale qui se retrouve dans les maquettes de conception et qui peut nous servir », indique Pierre-Olivier St-Jean. En plus de détailler quel système de ventilation alimente quelle zone de l’hôpital par exemple, la base de données contiendra aussi des informations sur la nature des entretiens à effectuer, les garanties, etc.
Des équipes multidisciplinaires dédiées
Le principal défi dans l’implantation des bases de données n’était pas tant technologique qu’humain. Plusieurs rencontres impliquant des équipes multidisciplinaires ont été nécessaires pour développer une méthode de travail qui convenait à chacune des parties prenantes. De quoi avons-nous besoin ? Comment échangeons- nous l’information ? À quelle fréquence ? Un processus de consultation qui a nécessité de nombreuses heures de travail et du personnel dédié, ce dernier élément se révélant essentiel à la réussite du projet, de l’avis de Martin Ouellet.
La nécessité de réquisitionner de grandes équipes de travail fait croire à Pierre-Olivier St-Jean que la mise en place d’un tel système aurait été difficilement réalisable pour une construction de plus petite envergure avec du personnel réduit. En revanche, une fois que le modèle a été établi, il pourrait très bien être appliqué aux projets subséquents, peu importe leur taille.
Cet article est tiré du Supplément thématique – Bâtiment 2023. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
Ce sujet pique votre curiosité ? Lisez tous les articles du dossier BÂTIMENT 2023 :
- Un manifeste pour la décarbonation des bâtiments
- Rénover la plus haute tour inclinée au monde
- Assurer la conformité grâce aux fiches d’auto-inspection
- Tout savoir sur la norme BCZ
- Collège Sainte-Anne : collaborer pour atteindre la carboneutralité
- Le potentiel insoupçonné de l’ossature légère en bois
- Une construction brassicole sur un campus universitaire
- La recette UTILE : repenser le logement étudiant
- Récupérer l’énergie grâce à la cloacothermie