L’inauguration officielle de la dernière phase du mégaprojet du nouveau Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) met un point final à un projet pharaonique, évalué à 3,6 milliards de dollars.
Le mégaprojet s’est échelonné sur un peu plus d’une décennie et donne à la population un hôpital de classe mondiale avec des installations des plus modernes.
Après la construction du Centre de recherche en 2013 et de la première phase de l’hôpital en 2017, la dernière phase aura permis la construction de bâtiments complémentaires d’une superficie totale de 70 000 mètres carrés comprenant notamment des cliniques externes, des bureaux clinico-administratifs, une bibliothèque, des archives, des espaces de stationnement souterrain et l’amphithéâtre Pierre-Péladeau. Ce projet vise une certification LEED argent.
Originalement, Pomerleau, le constructeur, souhaitait conclure les travaux au mois de décembre 2020, mais la COVID-19 est évidemment venue jouer les trouble-fête. La livraison provisoire du projet s’est tout de même faite au mois d’avril 2021, avec un mois d’avance sur l’échéancier contractuel qui prévoyait la fin des travaux pour le mois suivant.
« Naturellement, avec la COVID-19, il y a eu l’arrêt des chantiers. C’était un arrêt de six semaines. Repartir un chantier de cette envergure-là, c’est quand même assez monumental », concède Joanne Parent, architecte associée chez Menkès Shooner Dagenais LeTourneux Architectes et chargée de projet adjointe et responsable du contrôle de la qualité architecturale du projet du CHUM.
D’ailleurs, la firme s’est jointe à la firme Jodoin Lamarre Pratte architectes pour former un consortium responsable de la finalisation de la conception ainsi que de l’exécution et de la surveillance des travaux. Pour ce qui est de la conception architecturale, elle a été effectuée à la phase précédente par CannonDesign et NEUF architect(e)s, tandis que l’ingénierie était l’affaire de Pageau Morel et associés ainsi que de SDK et associés.
Le coeur du projet
L’étincelant amphithéâtre Pierre-Péladeau constitue le joyau du projet. « Pour l’instant, c’est le bâtiment sur lequel j’entends le plus de commentaires. Il est très complexe par sa forme tout à fait particulière », souligne l’architecte au sujet de l’amphithéâtre flamboyant par son enveloppe et sa toiture toutes de cuivre. À cet effet, celui-ci est censé représenter un coeur humain. « C’est un endroit de collaboration, de rencontre et d’échange entre divers spécialistes, intervenants et la population. »
L’intérieur de l’amphithéâtre de 356 places possède effectivement une forme un peu conique. Pour ce faire, l’équipe de professionnels a conçu des murs courbés, inclinés de 4,5 degrés, donnant ainsi un effet évasé à la salle principale. Destiné à l’avancement de la science médicale, l’amphithéâtre pourra accueillir des projections de chirurgies ayant lieu dans d’autres pays, dans une optique de partage de connaissances. À la fine pointe, les technologies qui pourraient à terme inclure la réalité avancée et l’hologramme permettront ainsi aux spécialistes d’ici d’interagir en temps réel avec des professionnels de la santé d’ailleurs dans le monde.
Communication et coordination accrues
La communication constituait le nerf de la guerre pour mener à bien les travaux, surtout parce que l’hôpital n’a pas cessé ses opérations pendant le chantier. L’excavation, par exemple, a été une étape où la coordination entre l’entrepreneur et l’hôpital devait être très rigoureuse. Comme la nouvelle construction comporte quatre sous-sols et cinq niveaux de stationnement, d’importants travaux d’excavation ont été nécessaires, de manière à atteindre le niveau du roc. Plus encore, les canaux de communication entre l’équipe de réalisation et le CHUM ont été éprouvés, puisque le projet a été construit sur le mode conception-construction.
De ce fait, les plans ont fait l’objet d’incessants va-et-vient entre les architectes et le client, assurant ainsi que chaque aspect du futur hôpital répondra à des critères bien précis. « La conception se faisait toujours en collaboration avec les équipes du CHUM et Pomerleau afin de garantir que la compréhension soit partagée de tous et qu’on atteigne les exigences », se rappelle Martine Gévry, architecte associée principale chez Jodoin Lamarre Pratte architectes et chargée de la planification et du contrôle de la qualité architecturale des aménagements intérieurs. « Ce projet comporte énormément de documents qui ont été amendés en cours de route. »
Dans ce contexte de conception-construction, où les architectes dessinent en même temps que les bâtiments se construisent, où l’échéancier est effréné et où la taille du projet est hors norme, « je dirais qu’il s’installe une forme de fébrilité », avance Jacques Morency, directeur associé du projet de construction du nouveau CHUM. « Ça devenait difficile, car l’entrepreneur ne pouvait pas s’en aller seul en disant au CHUM «casse-toi pas la tête, on va te faire un bel hôpital, tu vas voir ça va être beau, ça va être correct. »
Des défis maitrisés
En plus des conditions climatiques rigoureuses pour les travailleurs, l’imposante logistique qu’appelle un chantier de cette taille et l’envergure des travaux à entreprendre, d’autres défis ont marqué le titanesque chantier du CHUM. Il faut se rappeler du dynamitage qui a été nécessaire à la construction de la première phase de l’hôpital (terminée en 2017). « À chaque dynamitage, les entrepreneurs se devaient de valider avec le CHUM pour voir si tout était conforme. Des équipes de chaque côté ne faisaient que ça, précise Jacques Morency. Les dynamitages étaient faits à des heures fixes. Après quelques centaines de dynamitages, les employés du CHUM commençaient à bien connaitre la méthode. »
Notons aussi parmi les défis la démolition de l’hôpital Saint-Luc dans un environnement exigu : « Certaines parties du bâtiment à déconstruire se trouvaient à moins de deux pieds de la construction neuve issue de la phase antérieure. Évidemment, beaucoup d’attention a été mise pour ne pas endommager le bâtiment », explique Martine Grévy. Soulignons finalement les exigences du CHUM en matière de cibles écoénergétiques. En effet, lors de la rédaction du cahier de charges, les cibles imposées par le gouvernement ont été revues à la hausse dans une perspective d’économie d’énergie. Il a été convenu d’une réduction de 40 pour cent du rendement énergétique de référence.
En dernière instance, le projet du CHUM consiste en trois phases de construction qui s’échelonnent de 2009 à 2021. C’est plus de 2 800 travailleurs par jour à l’apogée du chantier. Et plus de 400 000 mètres carrés en termes de superficie. La certification LEED OR a été obtenue pour le Centre de recherche alors que la certification LEED argent est souhaitée pour l’hôpital construit en deuxième et troisième phases. Seulement pour cette portion, 125 certificats de paiement ont été émis par l’entrepreneur – tant pour la conception que la construction –, la valeur de certains ayant atteint plusieurs dizaines de millions de dollars.
Cet article est tiré du Supplément thématique – Bâtiment 2021. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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