L’industrie de la construction se transforme et mise de plus en plus sur l’innovation pour réaliser ses projets. Après la modélisation des données du bâtiment (BIM) et l’utilisation des drones, une autre technologie commence à intéresser les entrepreneurs : la réalité augmentée (RA).
Cette nouvelle technologie, dont l’utilité a été prouvée dans plusieurs secteurs d’activité, comme le commerce de détail et la santé, fait tranquillement son entrée dans le domaine de la construction. Et pour cause ! La réalité augmentée a un énorme potentiel d’améliorer la précision et l’efficacité des travailleurs sur les chantiers.
Comment ? En combinant le monde physique et des éléments générés avec un logiciel pour créer un environnement immersif grâce aux caméras des appareils mobiles et des lunettes intelligentes. Ainsi, l’ajout d’informations virtuelles dans le monde réel par le biais d’un programme informatique permet à l’utilisateur d’interagir avec son environnement.
Concrètement, en construction, la réalité augmentée combine des projets architecturaux virtuels avec la réalité physique d’un chantier et permet aussi d’insérer virtuellement un objet dans un contexte réel pour simuler son impact dans le milieu environnant. Cette technologie offre désormais la possibilité de comparer le virtuel et la réalité en superposant les modèles BIM 3D. L’objectif est de mieux comprendre ce qui sera construit et où cela sera situé.
Pomerleau au stade de développement
Depuis quelque temps, l’entreprise Pomerleau travaille sur cette innovation qui pourrait éventuellement servir pour le contrôle de qualité sur ses chantiers. « Par exemple, après avoir fait une partie des travaux, nous pourrions être capables d’aller valider avec la réalité augmentée si cela a été fait selon le modèle. Est-ce que tout est correct pour la suite des travaux ? Cette technologie va nous permettre de détecter les problèmes », explique Vincent Melanson, gérant de projets, Recherche et développement et projets spéciaux, chez Pomerleau.
Dans certaines situations, détecter les erreurs de conception dès le début du projet permettrait de rectifier le tir plus rapidement et de réduire les couts. Malgré ces importants avantages, cette technologie n’est pas intégrée sur les chantiers, car l’alignement des modèles BIM avec l’environnement réel n’est pas encore à point, note monsieur Melanson. Son entreprise y travaille en effectuant plusieurs tests avec un casque de réalité augmentée et des applications.
« Dès que nous aurons implanté cette technologie, nous voulons être convaincus de la performance, de la valeur ajoutée et du rendement de l’investissement. On ne veut pas arriver avec des casques de réalité augmentée sur les chantiers et constater que personne ne comprend pourquoi on fait ça. »
Communication et sécurité
En plus de servir au contrôle de qualité, la réalité augmentée comporte plusieurs autres avantages. D’abord, elle favorise une meilleure communication entre les différentes parties prenantes du projet, car chacune peut visualiser des images ou des vidéos et détecter les erreurs même si personne n’est sur place.
Ensuite, cette nouvelle technologie permet d’améliorer la sécurité sur le lieu de travail grâce à des dispositifs de réalité augmentée, comme des lunettes ou des appareils mobiles, qui numérisent des étiquettes placées dans des zones ou des objets spécifiques. Ces étiquettes peuvent faire apparaitre des informations sur la sécurité ou sur d’éventuels risques pour les travailleurs.
De plus, la réalité augmentée a la capacité de montrer le produit final (par exemple, le bâtiment) en fournissant des informations sur l’impact que l’oeuvre aura sur l’environnement et le tissu social.
Finalement, cette technologie permet d’effectuer des mesures avec précision, car les dispositifs comme les casques et les lunettes intelligentes ont des fonctions qui servent à mesurer la profondeur, la hauteur et la largeur des objets.
Le jumeau numérique
Si les avantages de la réalité améliorée sont indéniables, les couts pour intégrer cette technologie pourraient refroidir les ardeurs des entrepreneurs. Au Saguenay, l’entreprise PMA a investi pas moins de 175 000 $ pour financer une application de RA qui facilite la fabrication de cloisons. Peu d’entreprises peuvent se permettre de faire de la recherche et du développement pour mettre de l’avant des innovations comme la réalité augmentée et également… le jumeau numérique.
Cette dernière technologie commence à être de plus en plus évoquée dans l’industrie de la construction. D’ailleurs, de grandes entreprises comme Pomerleau et SNC Lavalin ainsi qu’Hydro-Québec s’y intéressent.
Selon le Laboratoire de recherche sur les technologies de l’information dans la construction (LaRTIC), le « jumeau numérique peut se définir comme étant une réplique numérique d’un objet, d’un processus ou d’un système ». Cette réplique maintient un lien vivant en vue de fournir les éléments et la dynamique de son fonctionnement tout au long de son cycle de vie.
Le LaRTIC souligne que le lien se base sur une connexion qui aide à générer plusieurs données en temps réel au moyen de capteurs. « Ces données sont transmises de manière transparente, permettant à l’entité virtuelle (le jumeau numérique) d’exister simultanément avec l’entité réelle (le jumeau physique). »
Hydro-Québec l’a testé
Hydro-Québec a utilisé le jumeau numérique sur un de ses chantiers afin d’améliorer la productivité et la sécurité des travailleurs. « Nous pouvons, par exemple, calculer le temps que prend un opérateur de pelle mécanique pour creuser et charger le camion. Nous pouvons avoir une analyse de la productivité et les résultats sont très faciles à comprendre », explique le professeur à l’Université Concordia et directeur associé au Centre d’innovation en construction et en ingénierie et gestion des infrastructures, Amin Hammad.
Côté sécurité, cette technologie permet d’avertir le travailleur lorsqu’un danger est imminent grâce aux capteurs installés sur celui-ci. Encore en phase de développement, cette innovation est dispendieuse pour le moment, mais elle pourrait un jour être répandue dans le domaine de la construction. « Ce n’est pas pour des chantiers de moins d’un million. Par contre, c’est possible que dans quelques années, ce soit utilisé pour des projets d’ampleur moyenne ou plus petits. Il y a beaucoup d’espoir fondé sur cette technologie, qui peut entrainer plusieurs bénéfices », souligne le professeur Hammad.
Certains considèrent le jumeau numérique comme la prochaine étape de la transformation numérique, après le BIM. Il est probablement trop tôt pour l’affirmer. Cependant, une chose est certaine : le virage technologique s’accélère dans l’industrie de la construction, qui continuera d’innover dans les prochaines années.
Depuis l’an dernier, PMA, une entreprise spécialisée dans la conception et la fabrication de profilés en aluminium, se sert de la réalité augmentée pour visualiser un projet sur un téléphone intelligent. Grâce à cette application développée par le studio Strateolab, il n’est plus nécessaire d’utiliser le galon à mesurer pour planifier la construction d’une cloison en aluminium. De plus, cette nouvelle technologie permettrait de pallier le manque de main-d’oeuvre criant dans le secteur de la construction et de réduire les retards.
Sans oublier que le client peut recevoir une estimation rapide des couts de son projet alors que le fabricant évite de se déplacer sur place pour connaitre les matériaux nécessaires à la fabrication.
Cet article est tiré du Supplément thématique – Équipement de chantier 2023. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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