Les rénovations vertes : un stimulant économique

14 septembre 2011
Par Mathieu Fleury, architecte, P.A. LEED

En ces temps de ralentissement économique mondial, de nombreuses entreprises ne peuvent se permettre d'investir dans la construction d'édifices neufs à haute performance conçus selon les dernières normes environnementales, telle la certification LEED. Il est tout de même possible pour ces entreprises de prendre le virage vert sans que des investissements majeurs ne soient nécessaires. Une des stratégies les plus efficaces est la mise en œuvre de rénovations vertes sur leur parc immobilier existant. Si les avantages, notamment financiers, sont nombreux, l'impact sur l'environnement est également colossal : la mise à jour du bâti existant en fonction d'objectifs écologiques constitue une des façons les plus efficaces de réduire les impacts environnementaux causés par la construction et/ou l'exploitation des bâtiments.

 

Ajouté au fait que les bâtiments verts présentent de nombreux avantages environnementaux, ceux-ci peuvent également contribuer à l'amélioration de la compétitivité des entreprises qui en sont propriétaires ou locataires. D'ici quelques années, les compagnies qui auront réalisé des rénovations vertes, jouiront d'avantages sur le marché tels que : la réduction de leurs coûts d'énergie et d'exploitation, le coût de maintien d'actifs réduit à long terme, une meilleure productivité des employés, une plus grande satisfaction de ceux-ci, une image de marque améliorée et de meilleures relations avec la communauté. Un autre avantage non négligeable des rénovations vertes est qu'elles peuvent être réalisées sur plusieurs années dans le cadre d'un programme d'amélioration d'actifs. Ainsi, les bouleversements sur le fonctionnement quotidien des entreprises (déménagement, relocalisation temporaire, etc.) peuvent être minimisés, de même que les investissements requis.

 

Pourquoi entreprendre des rénovations vertes plutôt que des rénovations traditionnelles ? Un sondage a récemment été effectué auprès d'entreprises qui ont réalisés des travaux sur leurs bâtiments en appliquant la norme LEED-EB1. Selon les répondants, si la réduction des coûts d'exploitation constitue un incitatif majeur, de nombreux autres bénéfices sont considérés comme tout aussi, voire plus importants. Parmi ceux-ci, citons l’amélioration de la qualité de l'air et des environnements intérieurs, l'engagement environnemental corporatif, la publicité gratuite ainsi que l'augmentation de la productivité des employés et la réduction de l'absentéisme. Le sondage a également démontré que dans la majorité des cas, une majoration des budgets de rénovation de l'ordre de 5 à 10 % était requise pour adopter une approche « verte » plutôt que conventionnelle. 

 

Quelques stratégies

 

Les entreprises possèdent, pour la plupart, des plans de maintien de leurs actifs immobiliers. Ces plans prévoient les budgets pour les rénovations requises en fonction de la durée de vie des composantes des bâtiments. Ce sont ces budgets qui doivent être révisés afin de les augmenter à court terme pour ensuite les diminuer à long terme. Il s'agit  là d'un des principes fondamentaux de la construction durable : investir à court terme pour réduire à long terme. Une des stratégies les plus faciles à mettre en œuvre est le remplacement des appareils d'éclairage traditionnels par de nouveaux appareils à très faible consommation énergétique et à durée de vie accrue.

 

Une seconde approche consiste à profiter de la lumière naturelle aux endroits où elle est disponible. Ceci peut impliquer la mise en place de nouvelles fenêtres et de cellules photosensibles qui régulent l'éclairage en fonction du niveau de lumière naturelle présente. Parmi les autres stratégies possibles, notons le remplacement des systèmes de CVAC par des systèmes à haute performance ainsi que l'amélioration de la résistance thermique de l'enveloppe. Il est également facile, lors de la rénovation de revêtement de toiture ou de stationnement, d'opter pour des matériaux à albédo élevé. Le fait d’opter pour des matériaux écologiques a, dans la grande majorité des cas, peu ou pas d’impact budgétaire. 

 

Un rendement de l’investissement positif

 

L'entreprise de logiciels Adobe Systems a récemment procédé à une mise à jour « verte » de son siège social situé en Californie. L'investissement de 1,4 million $ a donné des résultats étonnants et rapides : réduction de la consommation d'électricité de 35 %, réduction de l'utilisation du gaz naturel de 41% ainsi qu’une diminution de l'utilisation d'eau potable de 22 %, et ce, malgré une augmentation du personnel de 35 %. Leur siège social, maintenant certifié LEED Platine par le USGBC, constitue une réalisation exemplaire au niveau environnemental. Le rendement de l'investissement s’est manifesté environ neuf mois plus tard et l'entreprise réalise maintenant des économies de l'ordre de 1,2 million $ par année. Il va sans dire qu’Adobe utilise ces faits pour promouvoir son engagement environnemental et son image de citoyen corporatif responsable.

 

Plus près de nous, une réalisation exemplaire est la mise à jour énergétique du Complexe scientifique du Québec, à Québec, gérée par la SIQ. Ces travaux ont permis de réduire les coûts relatifs à l'énergie de 25 % et les émissions annuelles de GES ont chuté de 85 %.

 

Il est prévisible que la part du marché de la rénovation verte augmentera de manière importante au cours des prochaines années. En effet, un récent rapport de McGraw-Hill Construction prévoit que les rénovations vertes occuperont de 20 à 30 % du marché de la rénovation d'ici 2014. Mieux vaut agir rapidement, car avec les coûts énergétiques qui ne cesseront d'augmenter, la compétitivité de plus en plus dynamique des entreprises sur les marchés ainsi que les exigences de plus en plus élevées des employés pour un milieu de travail sain et stimulant, il semble évident que l'écologisation du bâti existant a le potentiel de stimuler la croissance économique des entreprises qui y prendront part.

 

1. http://www.deloitte.com/assets/Dcom-UnitedStates/Local%20Assets/Documents/us_re_Dollars_Sense_Retrofits_190608_.pdf

 


L’auteur est architecte pour la firme Vachon & Roy à Gaspé. On peut communiquer avec lui à mfleury@vachonroyarchitectes.com.

Conseil du bâtiment durable du Canada - section du Québec

Cette chronique est parue dans l’édition du vendredi 26 août 2011 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !