Milieu de vie durable : architecture, environnement et occupant

4 avril 2011
Par François Cantin, M. Sc. Arch.

Après de nombreuses discussions avec des collègues et autres professionnels concernant les récentes conférences de Bill Reed à Québec et Montréal, la notion de durabilité en architecture m'apparaît plus que jamais fort stimulante.

 

Brièvement, rappelons que le design régénératif préconisé par Bill Reed vise entre autres l'habitation du territoire et non plus sa simple occupation. Pour ce faire, nous avons le devoir de nous remémorer collectivement les relations privilégiées qu'entretenaient nos ancêtres avec la nature. Après quoi, il devient possible de créer un potentiel, de construire des relations réciproques et non pas de générer uniquement du matériel. Dans la foulée du discours de Bill Reed, plusieurs professionnels orientent de plus en plus leur enseignement et leur travail de manière à encourager et générer une architecture plus intégrée et plus intégrante.

 

Étroite relation

Dans leur plus récent livre portant sur l'éclairage en architecture[1], Peter Treganza et Michael Wilson discutent de leur vision d'une conception architecturale optimale en évoquant, tout comme Bill Reed, l'étroite relation à tisser entre architecture, environnement et occupant :

 

Un bâtiment remarquable a quelque chose de nouveau à offrir lors de chaque visite. Il informe sur les gens qui l'ont érigé et sur ceux qui l'habitent, reflétant à la fois leurs intérêts et ce qui leur tient à cœur. Il instruit sur son environnement, le climat et la terre, tout en informant sur les événements qui se sont produits sur le site depuis son implantation. L'ensemble de ses composantes a une signification et contribue à raconter une histoire à plusieurs échelles, soit par une silhouette qui se découpe à l'horizon ou encore grâce à une proximité qui révèle matériaux et assemblages.

 

Afin de présenter une théorie et des méthodes efficaces en éclairage, les auteurs s'inspirent de l'architecture vernaculaire, soit de stratégies architecturales issues de centaines, voire de milliers d'années d'évolution de la pensée constructive. Par le fait même, ils accordent une importance particulière aux caractéristiques lumineuses propres à chaque région (couverture nuageuse, climat, etc.) et l'impact que celles-ci doivent avoir sur la réflexion des concepteurs face à leurs projets. La théorie proposée est relativement simple, très low-tech, permettant de tirer le meilleur de situations courantes ou particulières.

 

Pour Tregenza et Wilson, l'attention que l'architecte doit porter à l'éclairage est nécessaire pour en assurer l'efficacité et la qualité, mais doit aussi servir à ajouter de la valeur au projet, une richesse et une finesse particulières, impalpables. À l'image de Bill Reed, on s'éloigne de l'objectif purement matériel.

 

Approche vernaculaire centrée sur l'habitant

Cette réponse pertinente à un climat et à un environnement particuliers se retrouve au cœur du travail effectué par plusieurs firmes d'architecture à travers le monde. À cet effet, David Cook, associé au sein de la firme allemande de renom Behnisch Architekten, insiste sur le fait que l'architecte a bien plus besoin d'une approche vernaculaire évolutive que de nouveaux outils informatisés (ou autres) afin de concevoir de meilleurs projets[2]. L'application d'une telle approche demeure le moyen le plus efficace pour identifier les réponses les mieux adaptées aux pays et aux cultures hôtes du projet.

 

Toujours selon Cook, construire des bâtiments centrés sur les futurs occupants et non à leur détriment est l'approche qui doit primer. Ainsi, un projet réussi en est un qui encourage une interaction entre les gens et leur environnement immédiat, qui offre des possibilités d'adaptation et de contrôle permettant d'ajuster l'architecture en fonction de besoins spécifiques. Trop souvent, les problèmes relatifs à la conception de projets sont résolus à l'aide d'un apport technologique majeur qui dénature la relation homme/architecture et rabaisse, plus souvent qu'autrement, le bâtiment au statut de simple objet.

 

En contrepartie, s'assurer que le bâtiment, peu importe son envergure, comporte une constante référence à l'échelle humaine permet de contrer cet effet. Malgré qu'un programme vaste et complexe ne peut, dans les faits, que demeurer un grand projet, une attention particulière aux systèmes de circulations internes ou encore la segmentation en sous-ensembles peuvent donner à un projet un caractère plus adapté à ses occupants et à son environnement immédiat, comme cherche à le faire Bill Reed.

 

En terminant, sachez qu'il me fera plaisir de prendre connaissance de vos commentaires concernant cette chronique ou tout autre sujet connexe. Pour ce faire, vous pouvez me contacter à l'adresse courriel suivante : fcantin@hudonjulien.com.

 

 

L’auteur est stagiaire en architecture chez Hudon Julien et Associés, bénévole au sein de la section du Québec du CBDCa et membre d’Écoopération, une coopérative offrant divers services de consultation en architecture durable.

 

 


[1]              Treganza, P. et Wilson, M. (2011) Daylighting : Architecture and Lighting Design, New York : Routledge.

[2]              Velux Dialogue : Cook, Sorensen hammer, Daylight & Architecture : Magazine By Velux, automne 2011, no 14, pp. 92-105.