Encore méconnue, cette certification internationale est un outil aussi bien utile que crédible poussant les entreprises à se démarquer et à agir dans l’intérêt du bien commun.
La certification B Corp, basée sur une évaluation rigoureuse, atteste qu’une entreprise à but lucratif répond aux normes les plus élevées en matière de performance sociale et environnementale, de transparence et de responsabilité. Créé en 2006 aux États-Unis, ce véritable mouvement espère utiliser le pouvoir du monde des affaires pour transformer l’économie mondiale afin que tous puissent en bénéficier. Ici, cet engouement pourrait se répandre comme un véritable feu de brousse : « La croissance au Québec est très importante.
En 2022, il s’agissait de la région en Amérique du Nord qui avait la plus forte croissance après la Californie. On voit donc qu’il se passe quelque chose dans la province », souligne Aurelia Talvela, présidente de B Local Québec.
On commence notamment à observer cet enthousiasme dans l’industrie de la construction, entre autres chez Construction Longer. Cet entrepreneur général est d’ailleurs le premier dans la catégorie « contracting and building » au Québec et le cinquième au Canada à obtenir cette mention.
Un processus rigoureux
L’aventure vers l’obtention de cette certification s’est amorcée lors du lancement d’un sondage par Construction Longer auprès de son personnel afin de recueillir des idées sur la direction que devrait prendre l’entreprise. Rapidement, un engouement pour le développement durable a émergé des réponses. Ce thème résonnait d’ailleurs avec la vision des gestionnaires qui se sont donné comme mission de « bâtir l’excellence ».
La certification B Corp (pour « beneficial corporations ») s’est ainsi présentée comme le chemin à prendre. Celle-ci examine divers critères des sphères environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) afin d’évaluer les performances d’une entreprise au-delà de ses résultats financiers. « C’est assez mobilisant, parce que ça donne plein de pistes de solutions pour arriver à toucher à ces trois sphères. Que ce soit un amalgame des trois, c’est ce qui nous intéressait », indique Pierre-Luc Auclair, président de Construction Longer. « La motivation première de chaque entreprise en ce qui concerne l’obtention de la certification est différente. Pour certaines, qui s’impliquent déjà auprès de leur collectivité ou de l’environnement, c’est pour faire vivre leurs valeurs. Pour d’autres, c’est pour répondre à la demande de leurs clients », ajoute Aurelia Talvela.
À la fin 2020, Construction Longer s’est ainsi engagée dans un processus de près d’un an et demi pour obtenir cette certification. Un audit a d’abord été réalisé à l’interne. L’entreprise a dû remplir une évaluation d’impact B (BIA), qui comporte environ 200 questions relatives aux pratiques, et remettre des pièces justificatives. Un comité externe d’auditeurs a ensuite pris connaissance du dossier afin de confirmer l’admissibilité de l’entreprise. Par ses efforts, Construction Longer a su démontrer qu’elle avait droit à la certification en obtenant un résultat de 91,3 points sur une possibilité de 200. « En moyenne, les entreprises reçoivent 50 points la première fois qu’elles remplissent le formulaire », souligne la présidente de B Local Québec. La note de passage se situe cependant à 80 points, peu importe le secteur au sein duquel oeuvre l’entreprise.
L’évaluation repose sur un questionnaire qui se divise en cinq grands thèmes : la gouvernance, les employés, la collectivité, l’environnement et les clients. On y retrouve aussi des questions concernant les risques encourus par l’entreprise. Et chaque réponse doit être accompagnée de documents prouvant les efforts réalisés.
Amélioration continue et mobilisation
Ce qui a aussi poussé les dirigeants à opter pour cette certification réside dans l’obligation d’un renouvellement tous les trois ans, cela demandant nécessairement, chaque fois, une amélioration continue des pratiques et une augmentation de son résultat. « C’est vraiment cet élément qui était aligné avec nos valeurs », mentionne Julie Fouquet, directrice de projets. D’autant plus que cet engagement force l’entreprise à se structurer pour mieux démontrer son impact positif dans la société. « Nous avons dû mettre en place des façons de faire, avoir des rapports plus automatisés », poursuit-elle. Comme l’entreprise excellait sur plusieurs points, elle n’a pas eu à réinventer ou à changer ses pratiques, souligne-t-elle.
La création d’un comité de développement durable a été l’une des premières actions mises en place. Ce dernier est composé d’une dizaine de représentants de chacune des équipes de l’entreprise qui compte près de 175 employés. Chacun des sous-comités s’est rencontré une fois par mois pour étudier les questions spécifiques qui étaient requises pour B Corp ou encore lancer des projets pilotes sur les chantiers. « On cherchait comment mettre un sceau sur notre mission, nos valeurs et notre vision. Le plus gros impact, c’est la mobilisation de nos équipes », estime Pierre-Luc Auclair. Selon lui, la certification permet également de donner une vision claire aux employés sur l’orientation à choisir lorsqu’ils doivent prendre des décisions. « Ils savent dans quel cadre l’entreprise fonctionne. Au-delà de la motivation au travail, ça oriente le travail des gens. »
Empreinte environnementale
Construction Longer a obtenu les meilleurs résultats dans les sphères sociale et de gouvernance. Ses plus gros efforts concernaient surtout l’environnement. En parallèle à la certification, une démarche avec le Fonds Écoleader et une consultante externe avait déjà été amorcée afin de réduire l’empreinte environnementale de l’entreprise. Par exemple, un projet pilote pour la gestion des matières résiduelles en chantier a été mis en place.
« Avec ce projet en parallèle, on a réussi à aller chercher des points. Mais notre focus demeure axé sur le volet environnement », fait savoir Julie Fouquet. Maintenant bien instauré, le tri des matières résiduelles en chantier est déployé dans tous les projets de l’entreprise, même ceux de plus petite envergure. Si l’ampleur du projet ne permet pas de disposer des matériaux dans des conteneurs directement sur le chantier, les contremaîtres peuvent les rapporter au bureau où ils sont triés à la source.
Un autre projet soutenu par le Fonds Écoleader est en cours avec le Centre de transfert technologique en écologie industrielle, où l’on procède à un échantillonnage des conteneurs. « Ils évaluent les matériaux qui restent dans les conteneurs et pour lesquels nous n’avons pas de filière pour les revaloriser. Par exemple, la laine minérale. En ce moment, à notre connaissance, il n’y a pas de débouchés si on veut la récupérer », explique la directrice de projets.
Une certification à connaître
Encore méconnue au Québec, la certification B Corp gagne à être davantage démocratisée, selon le président de Construction Longer. En effet, celle-ci a beaucoup plus de résonance en Europe ou chez nos voisins du Sud : « Aux États-Unis, les jeunes candidats ne postulent pas si l’entreprise n’est pas certifiée B Corp. C’est devenu un critère pour la nouvelle génération de travailleurs », fait-il remarquer.
Cette certification, dont les membres mettent leur entreprise au service du bien commun, a connu une forte progression depuis sa création, en 2006. On compte à ce jour plus de 6 200 entreprises dispersées dans 87 pays et 159 secteurs d’activité possédant la certification. Cela s’explique sans doute par les bénéfices qu’on peut en tirer : « On observe, par exemple, que la rétention des employés est généralement plus élevée chez les entreprises certifiées. On voit donc que la satisfaction des employés, mais aussi des clients, est plus grande dans ces entreprises », soutient Aurelia Talvela.
Pour contribuer à ce que cet engagement soit plus connu, Construction Longer a mobilisé sa responsable des communications auprès du comité local B Corp : « Plus nous serons nombreux à avoir cette certification au Québec, plus notre écosystème entrepreneurial sera axé sur des opérations plus durables plutôt que sur la création de profits. Il faut en faire, mais c’est important de donner une valeur ajoutée à tout le monde qui gravite autour de l’entreprise », termine Pierre-Luc Auclair.
Cet article est tiré du Magazine – Les Leaders de la construction 2023. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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