Signe des temps, les outils informatiques s’invitent aujourd’hui sur les chantiers dans le but affiché de les rendre plus sécuritaires.
Selon les données de l’ASP Construction, le taux de fréquence des accidents sur les chantiers a diminué de 400 % au cours des 25 dernières années. Un progrès attribuable notamment au perfectionnement des méthodes de travail et des équipements de protection collectifs et individuels, comme les garde-corps et les harnais antichute. Cependant, malgré le resserrement de la réglementation et les efforts de sensibilisation, la diminution de la fréquence stagne aujourd’hui autour de 1 % par année. Idem pour le nombre de morts accidentelles, qui se maintient autour de 13 par année.
Si les efforts consentis ne suffisent pas pour donner un nouveau souffle à la prévention sur les chantiers, les nouvelles technologies pourraient bien faire partie de la solution. D’autant plus que la nouvelle génération d’entrepreneurs est bien rompue à leur usage. D’ailleurs, si les systèmes de surveillance sont pratiquement devenus la norme pour protéger les chantiers contre le vol et le vandalisme, d’autres technologies sont aujourd’hui développées expressément pour assurer la sécurité des travailleurs au chantier.
Comme le système anticollision ID4 pour chantier multigrue de la firme française AGS, mis en scène lors des travaux de coffrage du site Glen du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Composée de capteurs de géolocalisation fixés à la flèche du mât et reliés à un ordinateur, cette solution stoppe les mouvements dangereux en agissant sur les mécanismes de la grue. Ou les capteurs Blaxtair de la start-up Arcure, également française, qui éliminent le risque de collision entre engins et travailleurs, en créant une zone tampon de 0 à 6 mètres autour des camions, compacteurs, chargeuses et autres engins de chantier.
Contrôler l’utilisation
Plus près de nous, Automation Machine Design (AMD), une entreprise québécoise spécialisée dans la conception et la fabrication d’équipements automatisés sur mesure, a mis au point le Data Logger, un enregistreur de données destiné autant au contrôle et à la gestion de l’entretien qu’à la formation et à la gestion des appareils de levage, comme les grues et les chariots élévateurs. « En gros, le Data Logger est une base de données autonome reliée à une base de données centrale au moyen d’une interface de gestion, résume le président de l’entreprise, Yves Caya.
« Il comprend plusieurs fonctions de contrôle, liées à un équipement spécifique, ajoute-t-il. Il restreint entre autres l’accès à l’équipement au personnel autorisé. Par exemple, si un travailleur n’a pas été formé pour faire fonctionner un équipement, il ne possèdera pas de numéro d’identification personnel, ni de carte RFID (carte de radio-identification), et il ne pourra donc pas démarrer l’engin. L’enregistreur permet aussi d’assurer un contrôle sur l’équipement et de produire des rapports d’utilisation en vue de son entretien, mais aussi de son utilisation sécuritaire. »
Des exemples ? Le Data Logger renseignera le propriétaire sur l’identité des utilisateurs d’une plateforme à ciseaux, sur le temps d’utilisation de l’engin, ainsi que sur les actions à entreprendre pour son entretien préventif afin d’assurer un fonctionnement sécuritaire. La pression d’huile et la température s’affolent ? Un voyant jaune ou rouge, selon l’urgence, préviendra l’opérateur contre d’éventuels dommages. L’opérateur n’a pas bouclé sa ceinture ? Le système empêchera la mise en marche de l’équipement. L’engin s’engage trop vite sur une pente inclinée ? Des capteurs fixés aux roues en freineront la course.
Prévenir le renversement
C’est dans le même esprit que la société Rayco Wylie a développé le i4000, un indicateur de stabilité pouvant être doublé d’un limiteur de portée. Cette solution électronique a été conçue pour réduire le risque de renversement frontal associé aux appareils de levage, comme les chariots à mât télescopique. Constitué d’un boîtier doté d’un écran d’affichage et d’un clavier, le i4000 se distingue par ses capteurs de charge intégrés à même la structure de l’équipement de levage, sans qu’aucune adaptation mécanique ne soit nécessaire.
« L’appareil mesure la force appliquée sur l’essieu arrière de l’équipement, explique Christian Roy, directeur de comptes pour Rayco Wylie. Par exemple, lorsque l’opérateur soulève une charge excessive, qui risque de faire basculer l’équipement vers l’avant en sortant la flèche, l’indicateur de stabilité émet une alarme sonore et visuelle. Lorsque le pourcentage de surcharge atteint 85 %, l’écran l’indiquera au moyen d’une barre graphique jaune et une alarme sonore intermittente se fera entendre. À 100 %, l’alarme sera continue et l’aiguille de l’écran se trouvera dans la zone rouge ou de danger élevé. »
Directeur technique pour Rayco Wylie, son collègue Laurent Després précise que le i4000 peut également être programmé afin d’y inclure un limiteur de portée. Une protection accrue pour l’opérateur dont l’équipement risque d’entrer en contact avec des lignes électriques aériennes, par exemple. « On parle d’appareil de levage, mais le système peut aussi s’appliquer à d’autres équipements de chantier, comme les grues mobiles et les excavatrices. Bref, notre système s’applique à tous les engins munis d’un mât et susceptibles de se renverser sous une charge trop lourde. »
Cet article est tiré du Supplément thématique – Santé et sécurité 2016. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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