La résistance des garde-corps mise à l’essai

4 octobre 2019
Par Jean Garon

La protection contre les chutes en hauteur par des garde-corps en bois ou métalliques est toujours recommandée sur les chantiers par le Code de sécurité pour les travaux de construction en vigueur au Québec.

Leur efficacité, en fonction notamment du lieu d’installation et des matériaux utilisés pour leur fixation, peut toutefois s’avérer incertaine. L’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST) a donc réalisé une étude visant à mesurer leur résistance et dont les résultats ont été dévoilés au printemps dernier.

 

L’idée de départ ayant mené à cette recherche, confie le chercheur Bertrand Galy, est une étude réalisée en 2011 par son collègue André Lan sur des garde-corps métalliques installés sur des parapets en laboratoire. Pour la nouvelle étude, il s’agissait d’élargir le champ de recherche en mettant à l’essai trois modèles de garde-corps métalliques, installés sur des toits plats de structures existantes de différents âges, en comparant leur comportement sous charges. En tout, 36 essais ont été effectués sur le terrain avec ce type de garde-corps.

 

Bertrand Galy, chercheur en prévention des risques mécaniques et physiques à l'IRSST. Photo : IRSST

 

Par ailleurs, ayant remarqué l’usage répandu de garde-corps en bois sur les chantiers de condos dans la métropole, Bertrand Galy a profité de l’occasion pour ajouter un nouveau volet à l’étude, portant cette fois sur des garde-corps en bois. Des essais de résistance ont donc été effectués en laboratoire sur des garde-corps construits en madriers de 2 pouces (po) x 4 po, soit 262 et 98 essais respectivement pour des garde-corps fixés sur des solives ajourées et d’autres fixés à un mur préfabriqué.

 

Multiples facteurs identifiés

L’étude globale menée par le chercheur de l’IRSST a démontré deux éléments distinctifs pour chacun des types de garde-corps. D’abord, « que la résistance des garde-corps métalliques dépend du mode de fixation et du fond de vissage, et que celle de ceux en bois dépend de plusieurs facteurs, notamment la condition du bois (humidité, pourrissement, présence de nœuds, etc.), le type de vis ou de clou utilisé et leur nombre ».

 

Dans son rapport, Bertrand Galy note que « les résultats des essais sur le terrain avec les garde-corps métalliques montrent une certaine influence du type de vis utilisé pour ancrer les bases des garde-corps, mais le nombre de vis utilisées au total demeure le paramètre le plus important. Aucun des essais avec une fixation sur une seule face du parapet n’a permis d’atteindre la résistance exigée par le Code de sécurité pour les travaux de construction (CSTC). » Il insiste donc sur l’importance de respecter les instructions du fabricant quant au nombre de vis à mettre en place.

 

« Pour les garde-corps métalliques, il n’y a pas de modèle qui soit supérieur à un autre ou particulièrement recommandable, précise-t-il. Par contre, on recommande clairement de les fixer sur deux faces du parapet (à l’horizontale et à la verticale), afin de s’assurer d’atteindre la résistance exigée. » Sur des parapets de petites dimensions, il est toutefois souhaitable de choisir un modèle de garde-corps avec des embases de fixations modulaires pouvant s’adapter à différentes configurations sur les chantiers.

 

La résistance des garde-corps mise à l’essai. Photo : IRSST

 

En ce qui concerne les garde-corps en bois, le chercheur précise que les essais sur des solives ajourées en laboratoire ont permis d’analyser l’influence de variables telles que la hauteur du garde-corps (1 m ou 1,2 m), la hauteur de la solive (9,5 po, 12 po, 14 po, 16 po), la configuration d’essai (1 travée, 3 travées, 2 travées avec force appliquée directement sur le montant) et les types de fixation (clous lisses, clous annelés, clous vrillés, vis à bois, tirefonds). Il ressort de cette étude que « les résistances obtenues sont plus grandes pour des garde-corps d’un mètre de hauteur et que la configuration d’essai la plus critique est celle où la force est appliquée directement sur le montant. De manière générale, les résistances obtenues sont plus importantes pour les solives de plus grandes dimensions, alors que la hauteur de fixation ne semble pas avoir d’influence notable pour le mur préfabriqué. »

 

Le chercheur reconnait que la recommandation est souvent plus difficile à mettre en place au chantier pour les garde-corps en bois. « Ça consiste à faire travailler les montants du garde-corps sur l’axe fort, c’est-à-dire sur leur côté le plus long. Ça se fait plutôt bien lorsque l’on est aux extrémités d’un balcon, par exemple, mais ce n’est pas possible de faire ça sur un mur préfabriqué. » Sinon, il conseille d’utiliser des vis à bois de 3 ½ po de longueur, qui fournissent un bon fond de vissage et qui peuvent être fixées assez rapidement sur la structure. Sur une poutre ajourée, quelle que soit sa hauteur, il recommande de mettre deux vis dans la partie du haut de la solive et une dans la partie du bas.

 

Dans le cas des garde-corps en bois installés sur des murs préfabriqués, ses recherches n’ont pas permis d’observer de différences vraiment marquées, suivant que les vis étaient espacées de 12 po, 16 po ou 24 po. Les trois configurations semblent donner des résultats assez similaires en termes de résistance à l’arrachement.

 

Des changements à venir ?

Somme toute, cette nouvelle recherche sur les garde-corps aura permis de détecter plusieurs déficiences dans leur fixation, ce qui pourrait inciter l’industrie de la construction à modifier les façons de faire. A priori, le chercheur Bertrand Galy ne prévoit pas de modifications réglementaires proposées prochainement par le comité de révision du Code. « Par contre, il est certain que nous allons discuter avec notre comité de suivi, à l’automne, pour voir comment on pourrait valoriser et diffuser au mieux ces résultats dans les milieux et sous quelle forme. »

 


Cet article est tiré du Supplément thématique – Santé et sécurité 2019. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !