À l’aube de la passation des pouvoirs, Marieville Construction s’appuie sur une de ses valeurs fondamentales pour réussir la transition : la prévoyance.
Par Marie Gagnon
La transmission d’une entreprise familiale ne s’improvise pas. Le parcours est en effet souvent long et semé d’embûches. Aussi, pour réussir ce passage obligé, mieux vaut s’y prendre à l’avance et en planifier chacune des facettes pour que la transition se fasse tout en douceur. Car, au bout du compte, il en va de la viabilité à long terme de l’entreprise.
C’est justement la tâche à laquelle s’est attelé l’an dernier Normand Blanchard, le président de Marieville Construction, une entreprise générale du secteur institutionnel, commercial et industriel. Lui-même catapulté du jour au lendemain à la tête de l’entreprise familiale, il tient à préparer le terrain avant de tirer sa révérence. Au seuil de la cinquantaine, il se donne une bonne dizaine d’années pour mener à bien cette transition.
« J’étais au début de la trentaine lorsque mon père a été terrassé par une rupture d’anévrisme au cerveau, relate-t-il. C’était en 1994. Je l’ai remplacé au pied levé. J’étais alors chargé de projet, donc je connaissais bien les rouages de l’entreprise. L’année suivante, j’ai racheté l’entreprise. Je me suis bien débrouillé depuis, mais je ne veux pas faire vivre la même chose à mon successeur. »
Planifier sa succession
Cet héritier est déjà désigné. Il s’agit de son fils Jérémy, né en 1995. Âgé de 18 ans, il étudie présentement en Technologie d’architecture au Cégep de Saint-Laurent. Mais, comme le signale Normand Blanchard, il est encore jeune pour décider de son avenir. Et peut-être ne sera-t-il plus intéressé à reprendre le flambeau lorsque le moment sera venu.
« Je privilégie d’abord la relève familiale, c’est sûr, confie le président de Marieville Construction, mais on n’est pas encore rendu là. Pour l’instant, ce qui compte, c’est d’assurer la pérennité de l’entreprise, au cas où je serais contraint de me retirer prématurément. »
Histoire d’assurer un transfert progressif des pouvoirs, Normand Blanchard se fait épauler, depuis l’an dernier, par un consultant spécialisé en succession d’entreprise. Ensemble, ils se sont entre autres penchés sur les fonctions occupées par le personnel- clé de Marieville Construction. Tant du côté de l’administration que de l’estimation et de la gestion de chantier, les forces de chacun ont été soupesées afin de voir comment il était possible de les impliquer au niveau décisionnel.
« Je veux qu’ils profitent de la prospérité de l’entreprise sans nécessairement en faire des associés, poursuit l’entrepreneur. L’actionnariat n’est pas exclu non plus, mais on verra en temps et lieu. L’important, pour le moment, c’est de bien définir les rôles de chacun et de voir comment on peut faire progresser l’entreprise dans le futur. »
Gérer avec prudence
Si Normand Blanchard se montre prévoyant en planifiant dès maintenant la succession de son entreprise, il fait également preuve de prudence dans la gestion quotidienne des opérations. Pour lui, pas question de mettre tous ses oeufs dans le même panier. « On monte une marche à la fois et tous les risques sont calculés, souligne-t-il. Par exemple, je préfère prendre 10 projets de un million qu’un seul de 10 millions. »
Dix-huit millions trois cent mille dollars. C’est le montant auquel se sont chiffrées l’an dernier les recettes de Marieville Construction au cours du même exercice financier. Une hausse de plus de 20 % par rapport à 2011, qui faisait quand même très bonne figure avec des revenus de 14,5 millions.
Il faut dire que l’année 2012 s’est révélée exceptionnelle à bien des égards. L’entreprise, qui jusqu’ici misait surtout sur le secteur public pour assurer sa croissance, a réalisé une percée importante dans le secteur privé l’an dernier. Une avancée qui est arrivée à point nommé, alors que le secteur public connaissait un certain ralentissement.
« Du temps que mon père dirigeait l’entreprise, on était plutôt axés sur le public, se remémore Normand Blanchard. Mais depuis que j’ai racheté l’entreprise en 1995, j’ai beaucoup développé les affaires du secteur du privé. Aujourd’hui, je dirais qu’environ 40 % de notre chiffre d’affaires provient de projets privés. »
Un nouveau souffle
Par ailleurs, avec la relève qui se prépare, une nouvelle dynamique devrait s’installer au sein de l’entreprise, chacun se sentant davantage impliqué. Normand Blanchard dit aussi miser beaucoup sur la formation et le transfert de compétences pour améliorer le rendement de l’entreprise et la productivité sur ses chantiers.
Bien sûr, les fondements de la réussite de Marieville Construction ne se limitent pas à former du personnel et à en embaucher. Son président indique aussi privilégier une approche de partenariat dans ses relations avec ses clients comme avec les professionnels qui les représentent. En travaillant de concert avec toutes les parties, il dit favoriser ainsi un climat de conciliation qui profite à tout le monde.
Et c’est sans compter l’expertise développée par l’entreprise dans le secteur hospitalier. « On vient de finir des contrats à l’Hôpital du Haut-Richelieu et à l’Hôpital Charles-Lemoyne, fait valoir Normand Blanchard. Dans le passé, on a aussi travaillé dans presque tous les hôpitaux de la grande région métropolitaine. Ce genre de chantier est assez délicat. Il y a des risques de contamination et il faut tenir compte des besoins de fonctionnement du milieu. Cela demande une organisation, une logistique sans failles dans la planification des travaux. »
Depuis sa fondation en 1964 par Germain Blanchard, Marieville Construction occupe toujours les mêmes locaux sur la rue Dupont, à Marieville. « Mon père s’est établi dans sa ville, cela allait de soi, indique Normand Blanchard. Et je n’ai pas l’intention de déménager. Par contre, si cela était à refaire, je me rapprocherais des grands centres. »
Il précise que sa localisation ne l’a pas empêché de faire des affaires. Seulement, cela l’a amené à étendre son rayon d’action pour que l’entreprise familiale continue de croître. Aujourd’hui, il dessert toute la Montérégie et l’île de Montréal.
Un plus qui facilite par ailleurs la rétention de sa main-d’oeuvre. « Nos employés n’ont pas à s’expatrier, note-t-il. À la fin de leur journée de travail, ils peuvent rentrer chez eux. Une façon de concilier travail-famille sans nuire à la productivité sur les chantiers. »
Normand Blanchard préconise d’ailleurs une approche client fondée sur le partenariat pour aplanir les difficultés et mettre de l’avant des solutions pour rallier toutes les parties.
Cette approche est favorisée par la situation géographique de Marieville Construction. « Nos chantiers sont rarement à plus d’une heure de route de nos bureaux, indique-t-il. En fin de journée, tous nos contremaîtres viennent faire leur rapport à leur chargé de projet. Si un pépin surgit, on peut ainsi rectifier le tir rapidement. »
Cet article est tiré du Magazine – Les Leaders de la construction au Québec 2013. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
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