1968 : Année de tous les bouleversements

Les relations de travail sur les chantiers sont particulièrement houleuses, alors que les syndicats militent pour une nouvelle loi sur les relations de travail.

En septembre, la grève qui paralyse les chantiers de Montréal mène à une manifestation syndicale réunissant plus de 10 000 personnes. Les membres de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) et de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), qui se disputent des emplois sur les gros chantiers industriels à Baie-Comeau, à Gentilly et à Sorel, en viennent aux mains. Les pressions sont telles que le ministre du Travail, Maurice Bellemare, édicte une nouvelle loi sur les relations de travail.

C’est également au cours de cette année que l’Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec (ACRGTQ), successeur de la Quebec Road Builders, est reconnue comme une association patronale représentative.

Autre révolution d’importance, cette fois du côté de l’habitation. La Chambre des communes, sous la direction de Lester B. Pearson, adopte un projet de loi sur l’habitation afin de faciliter l’accès à la propriété. Cette loi rehausse le seuil des prêts assurés par la Société centrale d’hypothèques et de logement (SCHL). Les futurs propriétaires peuvent désormais emprunter jusqu’à 95 % de la valeur d’une habitation, le plafond étant fixé à 18 000 $. Ces nouvelles dispositions favorisent l’essor de nombreux projets résidentiels.

Peu après, afin d’accélérer le remboursement du déficit accumulé par la construction du métro de Montréal et l’Exposition universelle qui s’est tenue dans la métropole l’année précédente, le premier magistrat de la ville, Jean Drapeau, instaure une taxe volontaire. Celle-ci prend la forme d’une loterie offrant des prix d’une valeur totale de 150 000 $. Jugée illégale, cette taxe permet toutefois à la Ville d’amasser quelque 17 millions $ avant d’être invalidée cinq mois après son adoption.

Pendant ce temps, les investissements se multiplient aux quatre coins de la province. À commencer par la construction du pont Papineau-Leblanc, dont les coûts s’élèvent à 5,3 millions $. Les travaux, qui s’échelonneront sur 14 mois, sont réalisés par la Dominion Bridge à partir de plans et devis réalisés par les ingénieurs de Gendron Lefebvre. La firme se voit d’ailleurs récompenser par l’Association des ingénieurs-conseils du Canada (AICC) pour l’excellence de la conception et de la réalisation de ce pont qui relie Montréal et l’île Jésus.

À Kirkland, deux grandes pharmaceutiques, Charles E. Frost et Merck Sharp and Dome of Canada, s’unissent pour ériger un vaste complexe industriel. Le projet, qui se chiffre à 11 millions $, comprendra des laboratoires dédiés à la recherche en santé mentale et en maladies cardiovasculaires. Du côté de Varennes, on annonce la construction d’une distillerie d’alcool éthylique synthétique de 10 millions $ et dont la capacité de production annuelle d’alcool éthylique et anhydre s’élèvera à 15 millions.

Alors que Martin Luther King et Robert Kennedy sont assassinés aux États-Unis, le Québec vit un grand deuil avec le décès soudain de son premier ministre, Daniel Johnson, la veille de l’inauguration du complexe hydroélectrique de Manic-5. En sa mémoire, l’ouvrage, qui allait devenir le plus grand barrage à voûtes et contreforts du monde, est renommé barrage Daniel-Johnson. Sur une note plus positive, les cérémonies protocolaires soulignant la réouverture du Forum de Montréal, nouvellement agrandi, ont lieu le 2 novembre.