Commandé par l’Équipe mondiale d’experts pour l’Adaptation au changement climatique de la Banque mondiale, le rapport intitulé Baissons la chaleur (Turn Down the Heat) esquisse les conséquences probables associées à un réchauffement climatique atteignant 4 °C d’ici la fin du siècle. Rendu public en novembre dernier, ce rapport se veut une tentative rigoureuse de description d’une série de risques liés au changement climatique, mettant particulièrement l'accent sur la situation des pays en développement et les populations les plus pauvres de la planète.
État des faits
Selon les auteurs, le verdict scientifique voulant que les activités humaines soient responsables du réchauffement de la planète est sans appel. Actuellement, ce réchauffement se traduit par une hausse de la température moyenne mondiale d’environ 0,8 °C en comparaison avec le climat qui prévalait à l'ère préindustrielle, soit à la fin du XVIIIe siècle. Bien qu'un tel réchauffement puisse sembler minime, voire insignifiant, le rapport rappelle que beaucoup d’effets des changements climatiques sont déjà observables et qu’une augmentation de 0,8 à 2,0 °C (ou plus) posera des risques encore plus importants.
Dans les faits, l'augmentation envisagée de la température moyenne de la planète de 4 °C s’approche des grandes variations historiques connues. Toutefois, contrairement à la baisse de la température moyenne globale d’environ 4,5 à 7 °C observée sur des millénaires ayant été à l’origine de la dernière époque glaciaire, les changements climatiques actuels causés par les activités humaines se mesurent sur quelques siècles !
Conséquences
Une élévation de 4 °C de la température entraînerait des vagues de chaleur sans précédent, de graves sécheresses et d’importantes inondations au sein de nombreuses régions, ce qui aurait de sérieuses répercussions sur les écosystèmes et les services qui leur sont associés. De plus, les auteurs s'entendent pour dire qu'aucun pays et région ne sera à l’abri des impacts liés au changement climatique. À titre d'exemple, les États-Unis ont vu 80 % de leurs terres agricoles être affectées par une sécheresse en 2012, ce qui correspond, pour ce pays, à la plus grave sécheresse depuis les années 50.
D'autre part, à l'échelle internationale, la production agricole a souffert et continue de souffrir de la hausse des températures. À ce sujet, des études récentes soulignent que depuis les années 1980 la production de maïs et de blé a connu une réduction significative par rapport au niveau qu’elle aurait eu en l’absence de changement climatique.
Si tous seront touchés, la répartition des impacts quant à elle sera probablement intrinsèquement inégale et plutôt défavorable aux régions les plus pauvres du monde. Disposant de très peu de moyens économiques, institutionnels, scientifiques et techniques, ces régions pourront difficilement faire face et s'adapter à cette nouvelle réalité.
Incertitudes et risques
Bien que des incertitudes subsistent quant à la prévision de l’ampleur du changement climatique et de ses effets, les auteurs du rapport soutiennent qu'il est possible d'en évaluer le niveau risque. Le risque d’une hausse supérieure à 4 °C d’ici 2100, et ce, advenant le cas où tous les engagements actuels des différents gouvernements visant à mitiger le réchauffement sont respectés, se chiffre actuellement à environ 20 %.
En contrepartie, si les promesses formulées ne sont pas tenues, une élévation de température de 4 °C pourrait bien être observée aussi tôt que dans les années 2060. Dans ce cas, il faudra s’attendre à la poursuite du réchauffement qui pourrait dépasser 6 °C au cours des siècles suivants, une situation qui entraînerait entre autres une augmentation de plusieurs mètres du niveau des mers.
Changer maintenant
Sans modifications significatives de nos modes de vie, il est probable que des changements climatiques majeurs viennent affecter nos écosystèmes, et ce, dès 2060. C'est donc dire que quelques-unes des générations actuelles en subiront possiblement les conséquences. Ainsi, ce qui a longtemps été réservé « aux autres » nous est donc désormais destiné.
Face aux nombreux défis à relever, il importe de réaliser qu'il est encore temps de prendre des mesures afin de limiter, autant possible, l’élévation de la température. En ce sens, Jim Yong Kim, président du Groupe de la Banque mondiale, appelle à la mobilisation: « J’ai l’espoir que ce rapport nous fasse un choc tel qu’il nous pousse à agir. Même pour ceux d’entre nous déjà impliqués dans la lutte contre le changement climatique, j’espère que ce rapport les fera travailler avec un sentiment d’urgence encore plus fort. »
L’auteur est stagiaire en architecture chez Coarchitecture (anciennement Hudon Julien Associés), bénévole au sein de la section du Québec du CBDCa et membre d’ECOOP, une coopérative offrant divers services de consultation en science du bâtiment.
Cette chronique est parue dans l’édition du mardi 30 avril 2013 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !