Santé et bien-être dans nos milieux de vie

25 août 2015
Par François Cantin, M. Sc. Arch.

« Pour réellement améliorer le bien-être des occupants, la conception des bâtiments doit aller au-delà de simples paramètres tels que la température et l'humidité, elle se doit d'encourager les comportements soutenant la santé.1 »

Koen Steemers

Plus qu'une simple question d'accès à des traitements médicaux, la santé est largement influencée par la qualité des environnements qui nous entourent. Tel que le mentionne Koen Steemers, professeur à l'Université de Cambridge, la théorie et les recherches actuelles tendent à démontrer que l'accès à des ressources environnementales, sociales et physiques de qualité influence positivement notre cognition2, ce qui, au final, a le potentiel de favoriser les comportements sains de la part de la population en général.

 

En bref, les notions de santé et de bien-être reposent sur deux éléments clés : se sentir bien et être fonctionnel. Complexe, notre niveau de confort dépend donc à la fois de considérations qualitatives (sentiment de sécurité, impression de contrôle, etc.) et quantitatives (température, mouvements d'air, etc.).

 

Malgré l'apparente évidence de cette affirmation, force est de constater que la relation unissant architecture et santé n'a reçu que peu d'attention au fil des années. Dans les faits, l'intérêt a plutôt été porté vers les caractéristiques physiques (quantitatives) des espaces telles que la gestion du bruit, la qualité de l'air et de l'éclairage, et ce, au détriment d'une recherche holistique du bien-être. Ceci dit, malgré que la « science du bien-être » soit relativement récente, quelques pistes de réflexion s'offrent à nous.

 

Les voies du bien-être

Dans l'un de ses plus récents essais3, Koen Steemers souligne les démarches menées par le gouvernement britannique pour définir et vulgariser la notion de bien-être. Ces efforts ont conduit à la définition des Cinq voies conduisant au bien-être (Five Ways to Well-Being4), soit la nécessité d'être connecté aux autres (connect), d'être actif (keep active), d'être à l'affût (take notice), d'apprendre (keep learning) et de partager (give).

 

Malgré l'identification des comportements souhaitables, un défi demeure : concevoir des aménagements urbains et des bâtiments qui les facilitent et les encouragent. Pour ce faire, certaines règles du pouce auraient avantage à être mises en application sur une base plus régulière. Steemers partage quelques-unes de ces règles.

 

Être connecté

Il est de la responsabilité des villes et des municipalités de mandater des équipes de professionnels afin de créer des espaces publics « orientés piétons » afin d'offrir l'occasion aux gens de se croiser, de socialiser, de connecter. D'autant plus que ce type d'aménagement contribue à influencer positivement le bien-être à l'échelle de l'individu et de la communauté5. Ceci dit, tous n'ont pas les mêmes besoins en termes de socialisation. C'est pourquoi les espaces publics doivent être réalisés avec doigté. Leur localisation, leur flexibilité (pour divers types de rencontres), le sentiment de sécurité qu'ils inspirent ainsi que leur caractère unique font partie des facteurs à considérer.

 

Être actif

Plusieurs stratégies permettent de promouvoir l'activité physique dans les bâtiments. Parmi celles-ci, notons bien sûr l'aménagement de salles d'entraînement, mais aussi la mise en place de circulations horizontales et verticales à valeur ajoutée. Par exemple, la présence de lumière naturelle et de vues sur l'extérieur dans les aires de circulation permettra de bonifier les expériences offertes à ceux qui les empruntent, les encourageant à y revenir et réduisant du même coup l'utilisation des ascenseurs.

 

Être à l'affût

L'intégration d'œuvres d'arts, de plantations et de bancs publics sont des interventions somme toute simples et qui offrent l'occasion de s'arrêter, ne serait-ce qu'un bref instant, pour contempler et prendre (ou reprendre) conscience du monde qui nous entoure. Ces pauses, quoique ponctuelles, contribuent à abaisser le niveau de stress et d'anxiété.

 

Apprendre

Pour encourager et faciliter les comportements propices à l'apprentissage, il importe de fournir des espaces silencieux et calmes. Le confort acoustique des espaces est primordial afin de maximiser le potentiel d'apprentissage ainsi que pour assurer la productivité dans le cas d'un environnement de travail. D'autre part, l'aménagement et l'ameublement des pièces dédiées à l'enseignement et à la formation devraient toujours être pensés de manière à maximiser les interactions et les dialogues. Par exemple, des classes et des auditoriums de configuration semi-circulaire sont à privilégier.

 

Partager

Il demeure difficile d'établir une relation explicite entre l'altruisme et des paramètres de conception. Ceci dit, certaines études6 ont permis de démontrer que les comportements auto déclarés d'altruisme sont plus fréquents dans des quartiers et des voisinages offrant diversité, proximité et accessibilité.

 

1. Steemers, K. (2015) Architecture for well-being and health, Daylight & Architecture: Magazine by Velux, vol. 23

2. La cognition désigne l'ensemble des processus mentaux qui se rapportent à la fonction de connaissance tels que la mémoire, le langage, le raisonnement, l'apprentissage, l'intelligence, la résolution de problèmes, la prise de décision, la perception ou l'attention.

3. Steemers, K. (2015) Architecture for well-being and health, Daylight & Architecture: Magazine by Velux, vol. 23

4. Aked, J., Thompson, S., Marks, N., et Cordon, C. (2008) Five ways to well-being: The evidence. London: New Economics Foundation.

5. Cattell, V., Dines, N., Gesler, W., et Curtis, S. (2008) Mingling, observing, and lingering: everyday public spaces and their implications for well-being and social relations. Health Place, 544–561.

6. Anderson, J. (2014). Urban design and wellbeing.Cambridge: Doctoral thesis, University of Cambridge.


L’auteur est chargé de projet chez Coarchitecture , bénévole au sein de la section du Québec du CBDCa et membre d’ECOOP, une coopérative offrant divers services de consultation en science du bâtiment.

Conseil du bâtiment durable du Canada - section du Québec

Cette chronique est parue dans l’édition du mardi 26 mai 2015 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !