Un ciel de nuages de points qui s’éclaircit

22 décembre 2017
Par Michel Bouchard

L’utilisation des appareils de capture de données de terrain est de plus en plus répandue sur les chantiers du Québec et la tendance est loin d’être à la baisse.

Le point de départ de cette technologie des nuages de points, c’est l’information. Le calcul se veut simple : l’accumulation d’un maximum de données sur un chantier favorise une efficacité et un rendement optimaux. Voilà son utilité première. C’est grâce à un relevé effectué avec un instrument au laser que le procédé est rendu possible.

 

L’appareil balaye l’environnement qui l’entoure et enregistre les coordonnées de chaque élément présent dans l’espace avec une précision chirurgicale. Cela permet de cartographier l’état des lieux en trois dimensions, donc de capturer la réalité du chantier. Ce scanner génère des images riches en densité qui livrent un rendu précis des géométries complexes environnantes.

 

Même s’il existe depuis un moment déjà, l’effervescence entourant le procédé des nuages de points est palpable. C’est son accessibilité grandissante, en partie, qui se cache derrière sa récente hausse de popularité.

 

« La plupart des entrepreneurs de moyenne et de grande envergure utilisent les nuages de points depuis un certain temps, mais la démocratisation de la technologie est évidemment avant tout monétaire, illustre Sébastien Frenette, président du Groupe BIMdu Québec. De plus en plus, les appareils sont accessibles et moins chers, donc leur utilisation gagne en popularité et les gens de l’industrie commencent à y voir les nombreux avantages qui y sont reliés. »

 

Un investissement qui rapporte

Parmi ces avantages, on compte entre autres la possibilité de réduire le temps passé à effectuer des relevés, en ne déléguant qu’une seule personne sur les lieux et en évitant d’avoir à y retourner pour récupérer des données, la totalité de l’information pertinente et nécessaire ayant déjà été enregistrée. La dizaine de milliers de dollars qui suffit maintenant pour faire l’acquisition d’un appareil de base se voit donc rapidement rentabilisée.

 

De l’architecture de bâtiments à l’architecture de paysage, de l’excavation au coffrage, c’est là un atout précieux. « Les logiciels couramment utilisés sont de plus en plus compatibles avec les données des nuages de points, ce qui permet de miser sur les technologies axées sur le BIM », explique celui qui occupe également le poste de directeur BIM chez Provencher_Roy.

 

Cette technologie permet l’obtention d’un contexte précis dès le départ. « Auparavant, lors d’un nouveau projet, nous débutions généralement avec des plans CAD ou des PDF, si nous étions chanceux. Sur les projets de réfection plus anciens, il faut se débrouiller avec des plans qui n’ont pas été mis à jour. Pour s’assurer d’avoir des données précises sur l’état des lieux, on procédait avec le ruban à mesurer et la prise de notes, ce qui n’est vraiment pas optimal. Bien souvent, il fallait effectuer plus d’une visite pour s’assurer d’avoir tout en main. Avec les nuages de points, on peut cartographier et capturer la réalité au chantier en très peu de temps et en 3D. Avoir les données précises de l’état des lieux, c’est essentiel, parce que sans le réel, il est difficile de planifier la suite. »

 

Pour maximiser l’efficacité de ce mode de capture, il doit régner une bonne communication entre le gestionnaire et le technologue appelé à se rendre sur les lieux. « Les attentes et les directives se doivent d’être claires. Il faut travailler de concert avec les arpenteurs et les spécialistes parce que les renseignements qu’on peut recueillir sont pratiquement infinis. Il faut s’assurer de préciser sa demande et ses besoins, il faut donner un ordre de grandeur », précise Sébastien Frenette.

 

Un outil polyvalent

Extérieure ou intérieure, l’utilisation des nuages de points s’avère toujours aussi pratique. « Peu importe ce qu’on souhaite comme information, cela nous offre un point de départ. On peut obtenir la superficie d’un terrain, le plan de déformation d’une façade ou même déterminer les points hauts et bas d’une dalle de béton. Un entrepreneur pourrait même suivre l’état de sa quantité de matériel de remplissage ou de son stock de sable en un clin d’oeil sur une base quotidienne, s’il le désire, en comparant la déformation entre deux dispersions de points capturées à des dates différentes.

 

« Dans un tunnel, une rame de métro ou une mine, l’appareil fonctionnant avec un laser, donc une lumière, peut faire le travail dans le noir absolu. Il a comme seules limites la neige ou une importante quantité de poussière, puisque la pollution exige un nettoyage fastidieux des nuages de points obtenus. »

 

Au Québec, la modélisation des données du bâtiment (MDB), plus couramment appelée le BIM (Building Information Model), gagne en popularité et connaît une croissance fulgurante.

 

Chose plutôt normale, puisque le BIM englobe la gestion du cycle de vie de l’information d’un projet dans sa totalité. Du premier jet à la capture de la réalité sur le terrain, de l’idéation à la conception, de la programmation à la documentation, de la construction à la gestion au quotidien à la suite de la fin des travaux, il en couvre chaque étape.

 

Les donneurs d’ouvrage en font de plus en plus la demande un peu partout dans la province. Les projets pilotés par la Société québécoise desinfrastructures (SQI), par exemple, en exigent de plus en plus l’utilisation, elle qui s’est donné pour objectif un déploiement progressif et graduel du BIM-PCI dans sa feuille de route 2016-2021.

 

En somme, si un entrepreneur n’utilise pas encore le BIM, c’est généralement qu’il prévoit le faire incessamment, car l’industrie se mobilise autour de cette révolution qui facilite la collaboration entre les professionnels et permet de mieux assurer le suivi du cycle de l’information.

 

L’IMAGINATION COMME SEULE LIMITE

La technologie des nuages de points va plus loin que l’unique captation à l’aide d’un appareil statique. À titre d’exemple, le balayage par avion ou par drone est également utilisé dans la capture au laser. « Un aménagement de terrain de grande envergure peut être relevé avec le nuage de points via les airs, illustre Sébastien Frenette.

« La technologie peut s’étendre bien au-delà du monde de la construction; on pourrait scanner l’intérieur d’un musée et la salle d’exposition afin que les organisateurs puissent être en mesure de connaître les véritables dimensions de la salle, d’y ajouter la taille des oeuvres afin de s’assurer de la fluidité de la circulation à l’intérieur.

« Dans le réaménagement d’un stationnement, les nuages de points sont également d’une aide précieuse. Ils imagent virtuellement les problèmes de circulation éventuels. En fait, on pourrait dire que l’imagination est la seule limite de la technologie, on peut l’utiliser dans de nombreux cas de figure. »

 


Cet article est tiré du Supplément thématique – Bâtiment 2017. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !